Région Bretagne : un budget qui passe très, très juste…

Le budget de la Région Bretagne (1,7 milliards d’euros) a été adopté le samedi 26 février au soir, après deux jours de débats très dense. La majorité relative a réussi à passer l’épreuve, mais au prix d’une procédure discutable.

Samedi soir, l’ambiance est tendue quand les groupes d’opposition présentent leur position sur le budget : tous votent contre. Or, la majorité n’a pas la majorité absolue des sièges. Elle n’en a que 40 sur 83. Concrètement, au vote par groupe qui est la procédure habituelle, le budget serait rejeté. C’est pour cette raison que le groupe social-démocrate demande un vote individuel à bulletin secret.

Claire Desmares-Poirrier, du groupe Ecologistes de Bretagne (dont sont membres les élus d’EELV) et Christian Guyonvarc’h, du groupe Breizh a-gleiz (dont sont membres les élus de l’UDB et d’ESNT) critiquent ce choix et rappellent l’importance d’un vote public pour que les citoyens sachent quels élus votent le budget. Un débat juridique s’engage car le vote public, demandé aussi par le groupe de droite, pourrait primer sur le vote à bulletin secret. Les parties en présence citent des jurisprudences contradictoires. Dans le doute, l’opposition laisse le Président prendre la responsabilité d’organiser le vote à bulletin secret, mais la situation est confuse.

Les résultats tombent après le dépouillement : 40 pour sur 83, grâce à 5 abstentions et un nul, et 37 contre. Le budget passe d’un cheveu. Tous les regards se tournent vers le groupe centriste, très courtisé par Loïg Chesnais-Girard, et où siège un de ses anciens vice-présidents. Mais du fait du secret du vote, on ne saura sans doute jamais qui a vraiment fait passer ce budget.

Les raisons d’un blocage

Nil Caouissin, co-président du groupe Breizh a-gleiz – autonomie, écologie, territoires, explique ainsi la position de son groupe : « nous avons des désaccords forts avec certains points ce ce budget, sur la situation de l’eau, sur certains aspects de la politique agricole. Nous pointons aussi l’insuffisance de l’effort sur le logement. La majorité aurait voulu que notre groupe s’abstienne pour laisser passer le budget. Mais cela aurait supposé des négociations, que nous aurions bien sûr menées de manière solidaire avec les Écologistes de Bretagne. Sans entrer dans la majorité, on peut s’arranger pour ne pas bloquer l’institution, à condition que la majorité se décide à avoir des discussions globales ; là, on nous a appelé 3 jours avant le vote, à un moment où nous n’avions plus aucune marge de manœuvre, car la date de dépôt des amendements était passée. La majorité relative peut et doit gérer la région et il n’y a pas de majorité alternative, car nous ne nous mettrons pas d’accord sur un programme avec la droite, encore moins bien sûr avec le RN. Mais quand on n’a pas la majorité absolue il faut construire les majorités au coup par coup, et sur les gros dossiers, cela suppose des négociations en amont. »

Les grands enjeux du budget régional

Parmi les principales missions du Conseil régional qui se traduisent dans le budget, on trouve l’entretien et le fonctionnement des lycées, la formation professionnelle, la circulation des trains express régionaux (TER) et des cars régionaux, la gestion des ports… la mobilité a beaucoup fait débat car c’est un sujet sensible en Bretagne. Face aux critiques sur les insuffisances des transports ferroviaires et par car, le vice-président Michaël Quernez répond que la Région fait au mieux, avec un budget contraint. Un amendement, déposé par les groupes Breizh a-gleiz et Ecologistes de Bretagne pour mener des études sur plusieurs réouvertures de lignes ferroviaires, dont Auray-Saint-Brieuc, est adopté… malgré l’opposition de la majorité ! Autre point de débat : les salaires des conducteurs de cars, bien difficiles à recruter. Le vice-président admet qu’il faut en discuter. Le débat se place aussi sur le long terme : de gros travaux sont envisagés pour raccourcir le temps de trajet entre Brest et Quimper d’une part, Paris (et Rennes) de l’autre. Mais le coût des travaux est élevé pour les quelques minutes à gagner, et beaucoup s’inquiètent d’un assèchement du financement des transports du quotidien.

Tous autonomistes ?

Dès le début de la session budgétaire, Loïg Chesnais-Girard a affirmé plusieurs fois son adhésion à l’idée d’autonomie. Engagement repris par son vice-président aux finances, Stéphane Perrin. Les élus autonomistes et écologistes voient une de leur revendication phare assumée par la majorité. Plusieurs vice-présidents de groupe assument ensuite publiquement d’être « autonomistes ». L’idée fait son chemin !

> Ar Skridaozerezh / La Rédaction

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