Les choses bougent au Pays de Galles ! Au cours de l’année passée, suite au Brexit d’abord, puis à la pandémie, nous avons pu assister à une énorme poussée du nationalisme anglais. Certains politiciens anglais sont même allés jusqu’à proposer l’abolition pure et simple de l’autonomie galloise et la dissolution du Senedd (parlement gallois), ce qui évidemment a rendu les Gallois furieux et a eu un immense impact sur l’opinion publique au Pays de Galles.
Au cours de la même période, l’organisation transpartisane, Yes Cymru, a vu le nombre de ses adhérents grimper de 2000 à 18 500. De plus, des sondages d’opinion ont donné une estimation de 32 % d’intentions de vote en faveur de l’indépendance, ce qui au Pays de Galles est à la fois nouveau et absolument incroyable.
Prenant tous ces événements en compte et aussi parce qu’ils étaient d’avis « que le temps était venu de définir une constitution rassemblant tout ce qu’ils pensaient être les valeurs et les principes du Pays de galles », le Dr Huw Evans, un ancien juriste du gouvernement gallois ayant contribué à l’élaboration du « Government of Wales Act » de 1998 qui a permis l’autonomie (il enseigne maintenant à l’Université Métropolitaine de Cardiff) et le Dr Alan Sandry, maître de conférences à l’École de Gestion de l’Université de Swansea, ont co-écrit la Proposition de Constitution Galloise.
En plein milieu d’une pandémie mondiale, il s’est bien sûr trouvé des gens pour soutenir que ce n’était pas le bon moment, que le projet était hors de propos. La réponse des auteurs a été à la fois simple et extrêmement efficace. Elle devrait être une source d’inspiration pour toutes les petites nations : la recherche de la démocratie vient toujours à propos…
Ils insistent sur le fait que leur travail ne doit pas être considéré comme un texte fini, écrit une fois pour toutes, mais au contraire un travail en cours dont le but est de promouvoir et de documenter la discussion sur la façon dont un Pays de Galles indépendant pourrait et devrait fonctionner.
Leur autre but, non moins important, est d’aider à définir et identifier des valeurs essentielles qui sont au cœur du projet de constitution : « La souveraineté devrait être aux mains du peuple gallois et le pouvoir d’État et l’autorité seraient issus de cette volonté souveraine » art.1.
Le Dr Alan Sandry, inspiré par des discussions avec Daniel Turp, politicien québécois et professeur de droit à l’Université de Montréal, insiste sur le fait qu’une constitution devrait faire partie de chaque citoyen, basée sur des valeurs le représentant en tant que peuple, et non pas imposée d’en haut.
Leur projet propose de remplacer la monarchie constitutionnelle par une république démocratique, avec un président élu, mais politiquement neutre, qui n’appartiendrait pas à un parti et dont le rôle serait de représenter la nation dans son ensemble.
Parmi les principes les plus importants jetant les fondations de leur travail, on pourrait citer : la démocratie, la protection des droits de la personne et des libertés fondamentales, la promotion de la qualité de vie et du développement durable, la justice sociale et l’égalité devant la loi.
De tous les principes énoncés, l’un d’entre eux est complètement nouveau et mérite que l’on s’y attarde. Les auteurs l’ont nommé le « principe de vérité », dans l’article 13 de leur projet. Inspiré par l’usage de plus en plus fréquent en politique de mensonges ou de falsification de la réalité, l’exemple le plus récent et le pire étant il y a peu, la négation des résultats électoraux américains par Donald Trump et son incitation à l’émeute, leur but est de rendre les politiciens responsables pénalement pour de telles pratiques dans la conduite des affaires publiques, pratiques jugées dangereuses et vues comme une menace pour la démocratie.
En résumé, le travail des deux auteurs n’a pas seulement pour but de promouvoir débats et discussions sur la possibilité de l’indépendance galloise, mais aussi de déclencher une véritable réflexion sur les principes et les valeurs qui sous-tendraient cette société, qui seraient les lignes directrices de la vie publique galloise.
Car, comme ils l’écrivent eux-mêmes, « l’indépendance n’est pas la condition préalable à la justice sociale »… c’est tellement vrai et malheureusement si souvent perdu de vue dans l’histoire récente.
Dans un article publié par IWA (l’Institut des Affaires Galloises) le Dr Evans et le Dr Sandry concluent par ce commentaire : « Nous espérons que notre contribution est une étincelle qui allumera la discussion sur ce qu’une constitution galloise pourrait être un jour ».
On peut être certain que leur travail a atteint ce but, et pas seulement ! Il a sans doute allumé une étincelle d’espoir et peut être considéré comme un modèle par toutes les nations engagées dans la recherche de leur autonomie et de leur liberté.