Riche week-end de septembre dans le Kreiz Breizh avec les Journées du Patrimoine. L’occasion aussi de faire perdurer les traditions, comme à Poullaouën, Saint Herbot et Carhaix.
Côté traditions, on pouvait se retrouver à la Nuit de la Gavotte à Poullaouën et à la fête du beurre à Saint Herbot. On peut déjà parler de « traditions » pour ces deux manifestations qui fêtaient leur 30ème édition.
Samedi soir, à Poullaouën, faisant suite à un excellent concert d’Erik Marchand (accompagné par Titi Robin au oud et par le percussionniste Keyvan Chemirami au zarb) la veille, avait lieu le grand fest-noz de septembre organisé par « Dañs Tro ». La salle était une fois encore tout juste assez grande (et même trop petite par moments) pour accueillir la foule de ceux qui étaient venus là pour danser grâce à nombre de sonneurs et chanteurs, toutes et tous talentueux et connus – voire très connus – et qu’on ne citera pas de peur d’en oublier ! L’an prochain, on pourra danser dans une autre salle, la polyvalente refaite à neuf.
Non loin de là, Saint Herbot perpétuait le dimanche la tradition de la fête du beurre qui commence le matin avec la messe dans une chapelle dont la visite a toute sa place dans les journées du Patrimoine, messe où tous les cantiques sont en breton. Et le reste de la journée, animation musicale avec comme tous les ans les frères Morvan et avec cette année le bagad de Lann Bihouée, et animation autour des « vieux métiers ».
Toujours dans le Kreiz Breizh, à Carhaix cette fois, on pouvait pendant tout le week-end remonter le temps, en commençant par le XXème siècle. En effet, les Amis du Réseau Breton exposaient à la gare SNCF deux locomotives à vapeur, dont une loco Mallet, utilisée autrefois sur les réseaux ferrés à voie métrique de l’ancien réseau breton. Bonne occasion de rappeler que la « Kevrenn des Cheminots » de Carhaix fut le 1er bagad créé en Bretagne : c’était en 1947.
En remontant la grand rue (et dans le temps), on arrivait à l’Espace « Mari Eugénie ». Mari, c’est pour Mari-Anna Sohier-Le Dour. En 2002, elle était devenue, pour le Cercle Brug ar Menez de Spezet, reine du festival de Cornouaille. Et en 2016, Nolwenn Peuron du même cercle lui avait succédé en présentant un dossier sur les Sœurs Goadec. Son costume avait été créé en partie par Mari-Anna. Mari-Anna Sohier est par sa branche maternelle une Roparz, grande famille de la culture bretonne, et sa grand tante décédée en 2013 à 98 ans, était justement « Eugénie » Roparz, sœur de Loeiz (à l’origine du 1er fest-noz de « l’ère moderne » en 1954 à Poullaouën) et de Marcel. Elle même était une grand figure de Poullaouën dont elle avait fondé le Cercle celtique en 1937. Mari-Anna a hérité de la collection de costumes du Poher d’ Eugénie, qui avait beaucoup collecté sur le sujet, et elle l’a complétée avec ses propres acquisitions. Ce sont donc ces collections du Poher que l’on peut voir depuis avril 2019, l’exposition fermant début novembre pour reprendre en 2020.
Mais on avait dit qu’on allait remonter dans le temps : pour les deux journées du Patrimoine, on pouvait admirer à l’Espace « Mari Eugénie » une pièce extrêmement rare et fragile prêtée exceptionnellement par la ville de Carhaix, parce que sa fragilité ne permet pas de l’exposer en permanence. Le Télégramme nous dit que « cette tunique est classée monument historique depuis 2015. Selon le professeur anglais Michael Jones, l’objet, d’une grande rareté, remonterait au XVe ou au XVIe siècle. Mais sa présence à Carhaix demeure toujours énigmatique. Autrefois exposé à l’étage de la « Maison du Sénéchal », dans le petit musée de l’office de tourisme, un tabard (ou manteau de cérémonie) aujourd’hui conservé à l’hôtel de ville de Carhaix (Finistère) continue à soulever bien des questions. […] On a longtemps pensé qu’il s’agissait d’une tunique datant du XVIIe siècle, mais plusieurs avis d’experts l’ont plutôt datée au XVe ou au XVIe, ce qui en ferait une pièce d’une grande rareté. On en dénombrerait en effet une dizaine dans toute l’Europe, dont seulement trois en France, et celui de Carhaix pourrait bien être le plus ancien des trois. Venu examiner le costume en mairie de Carhaix, le professeur anglais Michael Jones, aujourd’hui retraité mais expert de renommée internationale, est aussi de cet avis : « Il y a plusieurs éléments, comme les hermines, armoiries des ducs de Bretagne, qui donnent à penser qu’il s’agirait plutôt d’un manteau du XVe. Il y a aussi la forme du vêtement, cohérente avec cette époque », estime-t-il. » Quant au blason de Carhaix bien visible au centre de la tunique, il y aurait été placé plus tard.
Pour terminer notre périple, après avoir vu ce vêtement que son âge fait sans doute remonter à l’époque d’Anne de Bretagne, déplaçons nous d’un peu plus de 2km… et de près de 6000 ans en arrière. Au lieu-dit Goasseac’h, près de la RN 164, et contigu à un champ qui est l’un des grands parkings des Vieilles Charrues, un autre champ avec au milieu une butte. Depuis cet été, des fouilles très prometteuses y ont été lancées, car sous cette butte il y a un cairn, sans doute plus long que celui de Barnenez (au Nord de Morlaix) qui fait déjà 75 m ! Pour l’instant, les fouilles qui reprendront l’été prochain comme de coutume, ne permettent pas de vraiment se faire une idée sur ce que c’était. Mais quand la visite est présentée d’abord par Clément Perrichot, directeur du Musée « Vorgium » de Carhaix, puis commentée avec enthousiasme et une bonne pointe d’humour par Kuba, parlant un excellent français avec l’accent de Pologne natale, cela change tout. Il connaît bien la topologie du site pour avoir participé aux fouilles estivales. Une visite qui, faite toute seul, n’aurait pas présenté beaucoup d’intérêt, prenait une toute autre dimension avec les explications de professionnels.