Le collectif Métro de Nantes présente son travail et propose une ligne

Métro de Nantes

Rendez-vous était donné jeudi 6 septembre au bistrot de Mr Jules, dans le quartier Sainte Anne, à Nantes. Le collectif Métro de Nantes créé en mars 2019 suite à une proposition de l’UDB y présentait ses premières réflexions.

On ne peut qu’être admiratif du travail réalisé en si peu de temps par le collectif Métro de Nantes. Lors d’une conférence de presse d’une heure environ, celui-ci a dressé des premières pistes de travail. « Nous n’avons pas la volonté de nous substituer à une réelle étude, juste de valoriser une analyse citoyenne des besoins de la population », tempère Aurélien Boulé en préambule. Loin des projets ficelés d’avance et dans l’entre-soi des réunions de commissions municipales, le collectif souhaite donc avoir son mot à dire sur la politique des transports nantais, à quelques mois des prochaines échéances électorales. L’objectif est assumé : qu’une étude sur le sujet soit lancée dès la prochaine mandature.

La raison d’être du collectif Métro de Nantes part d’un constat : celui de la congestion et de la saturation du réseau TAN, mais aussi du périphérique nantais. « Aujourd’hui, le réseau TAN, c’est trois lignes de tramway et un busway. La ligne 1 accueille 130000 passagers par jour et on estime à 140000 l’accueil maximum. C’est une des lignes de tramway les plus chargée de France », explique Aurélien Boulé.

Autre fait : le collectif estime qu’il y a eu très peu d’investissements sur des lignes structurantes depuis 2006. Or, la mobilité est devenue l’une si ce n’est la préoccupation majeure des Nantais et des Nantaises. La création du collectif Métro de Nantes a d’ailleurs déjà eu des conséquences positives puisque la maire, Johanna Rolland, a annoncé le 7 juin dernier la créations de 3 nouvelles lignes de tramway. Loin d’y être opposé, le collectif estime que ces annonces sont positives… à court terme ! « Avec 9000 habitants par an supplémentaires, le nouveau réseau atteindra vite ses limites si le développement de la ville de Nantes se poursuit sur cette lancée », prédit Aurélien Boulé. D’ailleurs, les ambitions actuelles du Plan de Déplacement Urbain (PDU) sont assez mesurées puisque la métropole s’est engagée à passer de 15 % aujourd’hui à 16 % de transports collectifs en 2030. Le collectif, lui, veut donner plus de place aux mobilités douces (vélo + transports collectifs) et « cherche à capter des voyageurs qui utilisent la voiture ».

La conférence de presse s’est poursuivie avec la présentation par Clément Poutriquet de la ligne proposée par le collectif. Première impression : on est loin de la logique centralisée typique des transports en commun français. Le tracé de la ligne (en orange ci-dessus) ressemble davantage à ce que se fait à Bruxelles (lignes 2 et 6) à savoir une ligne droite débouchant sur une boucle. Partant de la porte d’Ar Mor, la ligne desservirait des quartiers densément peuplés, mais non connectés au tramway (Dervallières, Procé, Malakoff, Martellière…) ainsi que certains points stratégiques de la ville comme la gare, l’arrêt Bretagne/Place du cirque, la gare de Pont Rousseau, le CHU ou encore la gare maritime. L’originalité tient donc surtout dans la boucle proposée depuis la porte d’entrée Guist’hau. Les tramways de centre-ville étant très régulièrement coupés par des manifestations ou des alertes, cette boucle permettrait de rejoindre rapidement d’autres secteurs de la ville (notamment la gare). Plusieurs fois durant la conférence de presse, les membres du collectif ont répété qu’ils concevaient leur ligne de métro comme complémentaire des autres transports collectifs.

Au total, 16,5 kilomètres de lignes, 19 stations et 4 communes desservies. Clément Poutriquet argumente : « cette ligne permettrait à ceux qui souhaitent prendre le train depuis l’extérieur de la ville de s’y rendre en moins de 12 minutes ». Couplé à des parkings relais, mais aussi à des haltes ferroviaires (comme à la gare maritime), le collectif parie sur une réduction de la circulation automobile en ville grâce à la fréquence (en heures pleines, un métro peut circuler toutes les 2 min et en heures creuses toutes les 5 min) et la capacité des rames (un métro peut transporter entre 200000 et 400000 personnes par jour). À titre de comparaison, quelqu’un qui arrive tardivement à la gare doit attendre parfois 20 à 30 minutes pour prendre un tramway.

En plus de nombreuses rencontres d’experts, le collectif a poussé ses investigations jusqu’à évaluer les coûts en s’inspirant des expériences de Rennes et de Toulouse. « Nous avons pris en considération les coûts et avons proposé quelque chose de raisonnable », se justifie Ronan Georget. À raison de 100 millions d’euros le kilomètres en souterrain, le collectif table sur un coût total d’environ 1,8 milliards d’euros. Un coût partagé entre la ville et l’agglomération, mais aussi la région, l’État et l’Europe si l’on en croit les plans de financement des villes concernées par le métro. Le collectif rappelle à ce titre que la ligne 1 du métro rennais a été rentabilisée très rapidement. Et pour ceux qui douterait de la possibilité de construire un métro dans un estuaire, il rétorque que d’Anvers à Rotterdam en passant par Bilbao, les exemples sont multiples, que les difficultés techniques sont tout à fait surmontables. Qui plus est, le collectif insiste sur l’idée que ce projet est une proposition et qu’il est évolutif.

En tout état de cause, la présence massive de la presse lors de cette conférence de presse prouve à elle seule l’enjeu de cette question du métro et plus largement des transports à Nantes. Reste à savoir si le collectif Métro de Nantes saura faire entendre ses (nombreux) arguments en faveur d’une ville décarbonnée pour demain ?

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]