Qui est Lydie Massard, première bretonne sur la liste écologiste aux européennes ?

Lydie Massard
Portrait de Lydie Massard par Nicolas Le Tutour

Mère de trois enfants, membre de l’Union démocratique bretonne, Lydie Massard a été propulsée sur la liste « Votez pour le climat » conduite par Yannick Jadot. Le Peuple breton l’a rencontrée chez elle, à Pontivy.

Née en 1978 à Loudéac, Lydie se marie très jeune et devient dans la foulée mère de deux premiers enfants : Thomas et Emma. Après avoir découvert son identité bretonne par l’intermédiaire d’une amie, Soazig, alors qu’elle étudiait le métier de bibliothécaire à l’université, Lydie se promet que ses enfants apprendront le breton ou au moins qu’ils auraient accès à leur culture : « J’ai cherché et je suis tombée sur l’école Diwan qui – hasard ou non – était tout près de la maison ! Déjà à cette époque, je m’ennuyais dans ma vie et j’ai commencé à faire du bénévolat. » À 23 ans, elle commence un engagement qui, dix-sept ans plus tard, ne l’a toujours pas lassée.

Après plusieurs années d’union, son mariage éclate. À 26 ans, Lydie doit reconstruire sa vie en repartant de zéro. Sans connaissance, sans réseau, elle choisit l’usine à Pontivy pour s’assurer un revenu. En intérim, elle découpe de la volaille, cuit de la viande, travaille en pâtisserie ou pour les usines de chips Bret’s… « Mon objectif était clair : obtenir des droits à la formation pour trouver un nouveau boulot. » L’objectif est atteint et Lydie se forme à être conductrice de ligne dans les usines. C’est à cette époque qu’elle rencontre Christian, son mari actuel. « Il m’a alors dit que je ne devrais pas faire un travail qui ne me plaisait pas, m’a proposé d’assurer tout pour moi le temps de trouver ce que je voulais faire réellement. Or, moi, c’est la cuisine qui m’attirait ! » (Christian, à côté, confirme : « Elle cuisine très bien ! ») Voilà Lydie repartie pour neuf mois de bac pro cuisine. Puis, de nouveau, elle multiplie les expériences professionnelles dans la restauration, mais aussi en base de loisirs à Guerlédan, au collège à Loudéac jusqu’à aujourd’hui, au lycée du Gros Chêne de Pontivy.

Engagement politique

Sa vie professionnelle étant plus stable, elle s’installe de plus en plus dans le militantisme associatif : « Quand j’ai eu Rozenn, je me suis engagée dans le gouren. J’ai d’abord intégré le bureau, puis je suis devenue présidente du club. » C’est peu après, en 2013, qu’elle rencontre l’UDB par l’intermédiaire de Françoise Flageul, élue à Pontivy. « Je pestais beaucoup parce que je considérais que la mairie ne s’engageait pas suffisamment pour Diwan. En parlant avec Françoise, j’ai découvert progressivement l’UDB. Dans sa jeunesse, Christian avait eu un mauvais contact avec le parti et était sur la réserve. » Un jour, Françoise Flageul que l’on avait chargée d’écrire un article pour le Pontivy Journal lui propose de soutenir la liste UDB aux européennes de 2014 (elle était portée par Christian Guyonvarc’h). « J’ai accepté, explique-t-elle. C’était la première fois que je m’affichais avec un parti, mais je n’étais toujours pas adhérente alors. Je n’ai pris ma carte qu’après les municipales. Je parlais avec Françoise du service public car à Pontivy, nous sommes aux premières loges concernant les réductions d’effectifs. À l’inverse, je ne savais pas ce qu’était le fédéralisme. J’étais plutôt issue du monde culturel. En devenant adhérente, j’ai découvert énormément de choses et j’en ai compris beaucoup d’autres aussi. »

Cinq ans plus tard, Emmanuel Macron est aux manettes de l’État et il a modifié les périmètres électoraux. Alors qu’en 2014, le scrutin se déroulait à l’échelle de grandes régions technocratiques, il y a désormais une circonscription unique qui empêche l’UDB de présenter sa propre liste. Fidèle à une tradition établie depuis plusieurs mandats désormais, le parti, par l’intermédiaire de la fédération Régions et Peuples solidaires, a choisi de se tourner vers EELV pour défendre son projet validé l’été dernier à Bayonne. Après plusieurs mois de négociation, l’affaire est conclue. Régions et Peuples solidaires, une fédération de partis dont est membre l’UDB, compte six candidats sur la liste de Yannick Jadot dont Lydie en 14e position (l’UDB compte aussi le Nantais Aurélien Boulé sur la liste, à la 65e place).

Des idées à défendre !

De la même manière que Lydie a su prendre en main sa vie, elle n’a jamais eu l’intention de rester spectatrice de la vie politique. Après avoir été suppléante aux dernières législatives, la voilà en campagne européenne et pas question de jouer les potiches : l’Europe, elle y croit ! « Beaucoup de projets européens servent le quotidien, mais on connaît mal les dispositifs. Nous accueillons par exemple chez nous un jeune Malien qui a intégré une classe dont l’objectif est de lutter contre le décrochage. Eh bien, c’est l’Union européenne et non le Rectorat qui paye ! Idem pour beaucoup de bibliothèques de campagne. Les gens voient juste dans l’Union européenne des directives, ils ne s’imaginent pas que sans ces fonds, la vie en Centre-Bretagne serait sans doute encore plus compliquée. Moi, j’ai envie de mettre en avant ces dispositifs. »

Elle s’insurge aussi contre le centralisme qui s’exprime dans tous les domaines en France. « Il n’y a qu’à voir les fonds du FEDER que l’Union européenne réclame à l’État qui n’a pas tout dépensé. Alors que, partout ailleurs, l’Union traite directement avec les régions, ici, c’est la Région Bretagne qui est faiseuse de projets, mais c’est l’État qui garde l’argent qui sert à financer les projets ! Résultat, à cause d’un soi-disant problème informatique, les dépenses n’ont pas suffisamment été engagées. La Région Bretagne a essayé de rattraper son retard, mais ce serait quand même plus simple si tout n’était pas, in fine, piloté par l’État ! On nous parle de manque de moyens, mais la centralisation prouve son inefficacité : l’argent est là, c’est l’organisation qui pêche ! »

À la 14e place de la liste écologiste, Lydie ne se fait pas beaucoup d’illusions sur ses chances d’être élue. Elle assure néanmoins la campagne pour la fédération Régions et Peuples solidaires, pour le Corse François Alfonsi en 9e position, parce qu’elle aussi est écologiste, tout simplement ! Cette campagne lui permettra aussi d’être plus respectée dans une autre bataille politique qui arrive : celle des municipales. Lydie s’est d’ores et déjà déclarée candidate d’une « primaire » destinée à désigner la tête de liste de l’union de la gauche pontivyenne, et qui devrait avoir lieu le 5 mai.

Plus qu’une passade, la politique a pris une place prépondérante dans la vie de Lydie. Preuve qu’en s’engageant, les femmes peuvent tenir le rôle qu’elles méritent dans la sphère publique !

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]