Soutien aux « faucheurs volontaires » à Quimper

faucheurs volontaires
Le mardi 2 avril, 7 « faucheurs volontaires » étaient convoqués à 14h tapantes au commissariat de Quimper. 3 autres l’étaient à Callac. Non pour fauchage mais pour « dégradation » de produits alimentaires en date du 16 mars 2019.

Commençons par noter que ces convocations arrivent beaucoup plus vite que pour des personnalités soupçonnées de malversations financières ! Dès 14 heures donc, une vingtaine de personnes étaient présentes pour soutenir ces faucheurs, dont des membres de l’UDB. Et ce sont au total une quarantaine de personnes qui se sont relayés pendant le temps des auditions. Les faucheurs étaient entendus un par un. La première à passer fut Marie Nicolas, pas étonnant pour cette figure quimpéroise de la lutte anti-OGM et antinucléaire, régulièrement convoquée pour interrogatoire ou procès un peu partout en France, comme récemment à Dijon. Parmi les soutiens devant la porte, il y avait bien sûr son mari Gilbert, antinucléaire et surtout pacifiste notoire depuis des décennies.

Que s’est-il passé ce 16 mars ? Il s’agissait simplement d’un étiquetage informatif sur la présence éventuelle de pesticides dans des produits à base d’huile de colza ou de tournesol. Ce jour-là, les faucheurs étaient intervenus dans 4 grandes surfaces de Quimper pour simplement coller des étiquettes sur des bouteilles d’huile et des pots de mayonnaise à base d’huile de colza et tournesol. Sur les 4 magasins, même si certains ne les ont pas laissé intervenir longtemps, seul le groupe Géant a porté plainte pour « 4800 € de produits ayant été rendus impropres à la commercialisation », tout ça pour des étiquettes ne portant nullement atteinte à l’intégrité des produits… Marie Nicolas était convoquée parce qu’elle avait été reconnue sur une photo prise à l’extérieur du magasin alors qu’elle-même n’y est même pas entrée ! À la sortie de son entrevue avec une OPJ – entrevue restée pour elle comme pour les autres très correcte il faut le dire – elle a précisé (comme les autres militants d’ailleurs) qu’elle avait une fois de plus refusé la prise d’ADN, ce qui en soit est considéré comme un délit…

Quel est le reproche fait aux produits incriminés ? En France, on cultive plus de 160 000 ha de tournesols et de colzas génétiquement modifiés par « mutagénèse ». Cette technique les excluait jusque-là du champ de la réglementation sur les OGM, en dépit d’une décision de la cour de justice européenne. Or, pour les faucheurs, cette mutagénèse fait de ces plantes de véritables « éponges à pesticides ».

Cet article n’a pas pour but de rentrer dans des considérations trop techniques, mais il faut quand même quelques explications. Le site « Campagne et Environnement » nous dit que « La transgénèse et la mutagénèse sont différentes. La transgénèse correspond à l’insertion d’une séquence nouvelle d’ADN, alors que la mutagénèse induite correspond, au sens strict, à la modification de l’information au niveau d’un gène, et n’implique donc pas une insertion de séquence d’ADN au niveau du génome. » Pour résumer ce qui précède, en France en particulier, on considérait jusque-là que la transgénèse crée des OGM, et que la mutagénèse n’en crée pas.

La Cour Européenne en a décidé autrement, en juillet 2018, donnant de fait raison aux faucheurs volontaires, ce qui n’est pas sans conséquence sur leur avenir judiciaire. En effet, comme nous expliquait Le Télégramme du 5 février 2019 : « En novembre 2016, 67 Faucheurs volontaires avaient « mis hors d’état de nuire » des essais de colzas mutés OGM rendus tolérants à des herbicides sur un site de Dijon. 38 d’entre eux, dont la Quimpéroise Marie Nicolas, avaient été poursuivis pour cette action. Ils viennent d’obtenir une relaxe définitive. Le procureur de la République n’a pas fait appel de la décision de relaxe du tribunal de Dijon, prononcée le 17 janvier. De ce fait, la partie civile (le groupe Dijon Céréales et un agriculteur) n’a pu le faire à son tour, soulignent les Faucheurs dans un communiqué. Cette relaxe va dans le sens de l’arrêt de la Cour européenne de Justice du 25 juillet 2018 qui confirme que ces colzas mutés sont bien des OGM ». Les Faucheurs demandent l’arrêt des cultures de plantes mutées rendues tolérantes à des herbicides. »

C’est donc fort de cet arrêt de la Cour européenne que les faucheurs s’en sont pris aux huiles et mayonnaises à Quimper. Quelle sera la suite pour eux ? Réponse de la justice (poursuite ou pas) dans quelques semaines.

> Christian Pierre

Né en 1949, Christian PIERRE est membre de l'UDB depuis 1977. Très engagé pour la Bretagne, il est très investi aussi dans les Droits de l'Homme, comme à l'ACAT (ONG chrétienne de lutte pour l'abolition de la torture et contre la peine de mort) dont il est animateur du Groupe Quimper-Cornouaille. Il milite enfin pour les droits du peuple palestinien.