Depuis plusieurs décennies, l’huile de palme est devenue l’un des produits phares de l’industrie. On la retrouve partout : produits alimentaires de toutes sortes, cosmétiques ou produits ménagers. Cette frénésie autour de ce produit provient de trois caractéristiques qui lui sont propre : elle n’a ni goût, ni odeur, ce qui est très pratique quand on recherche un corps gras qui ne laissera pas d’arrière-goût. Elle est facile à transformer et enfin, elle ne coûte quasiment rien !
Concernant les agro-carburants, l’huile de palme a très vite été présentée comme l’énergie verte de demain. À grands coups de campagnes et de stratégies « green-washing », l’idée que les biodiesels, particulièrement ceux à l’huile de palme, soient bon pour la planète et pollueraient beaucoup moins que le diesel ordinaire a fait son chemin dans la tête de nombreux consommateurs. Ces derniers, pour se dédouaner un peu de leur impact sur la planète, sont prêts à payer plus cher leur carburant (qui a paradoxalement coûté moins cher à la fabrication) afin de « rouler vert ».
Or, il n’en est strictement rien ! Non seulement les biodiesels à l’huile de palme sont tout aussi polluants que les diesels ordinaires, mais ils le sont encore bien plus ! Le biodiesel de palme produit ainsi trois fois plus de CO2 que le diesel ordinaire quand on prend on compte son processus de production.
Cela n’a pas empêché Nicolas Hulot d’annoncer, le 16 mai dernier, que Total serait autorisé à importer 300 000 nouvelles tonnes d’huile de palme en France (voir ici) afin d’en faire du bio-carburant portant ainsi la consommation à 550 000 tonnes… seulement pour les agro-carburants. Pour l’alimentaire, par exemple, il faut rajouter une consommation française à 136 000 tonnes par an… Cette décision est prise à l’encontre de l’Union Européenne qui a décidé d’interdire l’utilisation de l’huile dans les carburants en janvier dernier.
Les palmiers ne poussent correctement qu’en zone tropicale. Leur culture, titanesque, prend donc la place des forêts tropicales qui sont, après les océans, les premiers captateurs de CO2 de la planète. Leur destruction provoque ainsi des lâchées de CO2 dans l’atmosphère hors normes. Rien que l’année dernière, la déforestation en Indonésie a émis l’équivalent de quatre pays européens en gaz à effet de serre. Ce même pays a également perdu 20 % de sa surface en forêt tropicale en à peine 20 ans.
Avec ces forêts, c’est également des centaines d’espèces animales qui ont disparues ou vont l’être bientôt, au premier rang desquelles l’orang-outan. Ceci représente de même la spoliation de leurs terres des tribus indigènes condamnées alors à migrer dans les grandes villes et à voir disparaître leurs cultures spécifiques. Quand ce n’est pas le cas, ces peuples sont souvent laissés à la marge ou employés dans des conditions d’esclavage moderne, condamnés à participer à la destruction de la forêt qui les nourrissait.
En France aussi
Mais l’industrialisation des forêts ne se fait pas seulement dans les pays tropicaux. En France aussi les forêts sont vues comme étant en priorité une ressource économique.
Le 17 mai dernier, plusieurs centaines de forestiers se sont ainsi mobilisés dans plusieurs villes dans l’indifférence presque totale des médias (voir ici). Leur but était de dénoncer l’industrialisation massive des forêts publiques qui grignote sans cesse l’établissement public qu’est l’ONF (Office national des forêts) à travers la mise en place d’une convention collective. En plus de réductions drastiques dans le personnel, alors que le parc forestier s’étend, les forestiers dénoncent le fait d’être réduits à des coupeurs de bois pour l’industrie. Ainsi, la direction de l’ONF est accusée de demander de plus en plus de coupes au détriment de la régénération alors qu’il s’agit là d’une de ces missions. Face aux appétits de l’industrie forestière, l’ONF dénonce entre autres des menaces et des limogeages dans le personnel récalcitrant y compris aux plus hautes fonctions, le recrutement de personnel ayant des intérêts dans la filière bois, le refus de reclassement du personnel, des pratiques brutales de management, des décisions qui passent en force contre toute logique de la mission publique de l’ONF, une absence totale de contrôle de l’État, des stratégies désastreuses à travers l’externalisation de certaines missions et l’abandon progressif des missions environnementales, etc. On pourrait continuer la liste d’une gestion catastrophique d’un secteur pourtant vital pour l’environnement.
Force est de constater que la situation du climat et de l’environnement ne cesse de se détériorer malgré les grandes discours. La machine néolibérale semble s’emballer de plus en plus chaque jour.