La crise du beurre n’est pas drôle !

Tableau d’Antoine Vollon (1833 – 1900 ).

Cela fait plusieurs jours – et ce n’est pas la première fois – que les grandes surfaces sont en rupture de stock de beurre. Habitués à la surabondance, les consommateurs ont du mal à se l’expliquer et prennent cela à la rigolade en vendant des plaquettes de beurre sur Ebay ou en relayant toutes sortes de blagues sur le goût des Bretons pour cette denrée. Sauf que cette pénurie révèle un dysfonctionnement structurel de la filière lait.

Depuis quelques années, la demande de lait a explosé au niveau mondial générant une compétition beaucoup plus accrue dans la filière. Même si le ministre de l’agriculture se veut rassurant en estimant que cette crise ne durera pas, on remarquera que cette pénurie de beurre n’est pas la première et qu’elle risque de ne pas non plus être la dernière. Le cours mondial de la matière grasse s’est en effet envolé et les grossistes n’hésitent plus à vendre au plus offrant plutôt qu’en local, provoquant une rareté du produit dans les rayons, y compris des régions productrices comme la Bretagne ou même la Normandie.

Pourtant, les producteurs de lait avaient prévenu que, comme 2016, l’année 2017 ne serait pas une bonne année pour le beurre. La faute entre autre à de mauvaises conditions climatiques ayant entraîné une mauvaise récolte fourragère et donc une production de lait plus basse.

Certains n’hésitent pas à dire que cette pénurie est organisée par les industriels qui cherchent à faire pression sur les grandes surfaces pour renégocier le prix du beurre en stockant ou en vendant à l’étranger où est répercutée la hausse de prix dans les rayons afin de dégager de meilleures marges. Il faut dire qu’en France, le prix du beurre est fixé pour l’année, or le son coût a considérablement augmenté depuis janvier.

Industriels et grandes surfaces se mènent donc une guerre. A court terme, chacun s’accorde à dire qu’un hausse des prix du beurre permettrait de retrouver des plaquettes dans les rayons, mais le problème est autrement plus important puisque pendant que les industriels et les supermarchés s’empaillent pour savoir comment répartir l’augmentation des prix, les producteurs ne sont pas mieux payés ! Comme dit l’adage, « le cordonnier est toujours le plus mal chaussé ». Il serait temps que cela change…

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]