
Le Covid-19 n’a pas mis un terme aux projets du monde d’avant. En Bretagne, l’agriculture continue de diviser partisan de l’écologie politique et partisan du productivisme…
C’est ainsi que le Préfet du Morbihan a signé le 25 mars un arrêté autorisant l’extension d’un élevage intensif de volailles à Plaudren au nord de Vannes. Le projet consiste à produire 178 800 poulets dans quatre bâtiments de 5 960 mètres carrés au total, soit 30 bipèdes par mètre carré. Les poussins arriveront par camions de Caro et du Sourn, la nourriture sera entièrement importée, de France pour ce qui est des céréales et du Brésil pour le soja, en transitant par Saint-Gérand et Montauban de Bretagne et les poulets seront abattus à Guiscriff et à Guerlédan. Les fumiers seront quant à eux exportés. C’est donc des milliers de kilomètres qui seront parcourus par camions, en amont pour les intrants, et en aval pour la distribution des produits finis. Une filière longue donc qui ne permet ni l’autonomie des agriculteurs, ni celle des bassins de vie.
À contre courant
La Région Bretagne soutient financièrement ces projets d’agriculture productiviste. Le plan volaille prévoit de distribuer 5 millions d’euros pour construire 100 bâtiments de ce type en Bretagne, soit 50000 € d’argent public par projet. Des agrandissements de poulaillers industriels sont ainsi prévus Saint Guyomard, Plumelin, Berné, Priziac, Langoëlan, Néant-sur-Yvel pour ce qui concerne le Morbihan. 18 projets ont déjà été acceptés discrètement au mois de décembre en Bretagne, les porteurs de projets et la Région Bretagne préférant les faire connaître le plus tard possible.
L’objectif du plan volaille de la Région Bretagne est de reconquérir le marché français de la volaille de consommation hors foyer, la restauration scolaire par exemple. Actuellement, un poulet sur deux est importé en France du Brésil, de Pologne ou d’Ukraine. Toutefois, 40 % de la production française de volaille de chair est produite en Bretagne d’où les excédents d’azote qui se retrouvent dans nos cours d’eau et les pics de pollution de l’air, même durant le confinement.
Une enveloppe de 15 millions d’euros est également prévue par la région pour l’abattoir de Châteaulin dont le projet qui vient d’être suspendu par le groupe LDC. Le début d’un tournant ?
Pollution de l’air
Une enquête public a été menée fin 2019 pour le projet du Mené à Plaudren. 113 avis argumentés ont été recueillis. Un avis favorable a finalement été donnée par le commissaire enquêteur. Une seule réserve, symbolique, a été émise concernant la récupération d’eau pluviale. Ce qui devrait permettre de diminuer légèrement la pression exercée sur la ressource en eau. 6 000 m³ d’eau seront consommés tous les ans. À l’inverse, le problème plus préoccupant de la pollution de l’air ne fait l’objet que d’une recommandation. En effet, les fermes usines de ce type sont d’importantes productrices d’ammoniac. À l’instar du pic vécu fin mars, l’air en Bretagne est régulièrement pollué par ce gaz favorisant la formation de particules fines, causant des infections broncho-pulmonaires et participant à l’eutrophisation des milieux. Il est ainsi prévu de rejeter dans la nature près de 10 tonnes d’ammoniac par an, sans aucun traitement. Un tel système de lavage d’air coûte 124 000 € HT. Le fait qu’il ne soit pas rendu obligatoire revient donc à externaliser le coût de la pollution vers l’ensemble de la société, en contradiction avec la règle du pollueur-payeur. Il s’agit autrement dit d’une seconde subvention attribuée par la collectivité à un projet privé.
Comme à Langoëlan, la mobilisation se structure à Plaudren. Il est possible de déposer des recours contre l’arrêté préfectoral jusqu’à fin juillet. Une manifestation avait déjà eu lieu le 30 novembre à l’appel de la Confédération paysanne et un collectif a été créé.