Mercredi 12 février avait lieu au Tribunal de Grande Instance de Lorient le procès d’une jeune militante du collectif indépendantiste Dispac’h. Un rassemblement de soutien d’une soixantaine de personnes (auquel appelait l’UDB) avait lieu devant la grille pendant que la bataille juridique se menait.
Les faits : dans la nuit du 14 au 15 avril 2019, plusieurs tags apparaissent sur des agences immobilières ainsi que des mairies à Quiberon, Locmariaquer, Carnac, Saint-Philibert, La Trinité-sur-Mer. Ceux-ci indiquent un pourcentage assorti d’un numéro correspondant aux statistiques propres aux résidences secondaires. La prévenue, Aodren, est accusée de dégradation sur bien d’autrui et de refus de prélèvement d’empreinte lors de sa garde à vue alors même que le collectif Dispac’h n’a pas revendiqué cette action.
À cette époque, le collectif Dispac’h a réussi à mettre sur le devant de la scène la question des résidences secondaires et il n’en faut pas beaucoup plus pour que l’enquête s’oriente vers eux. D’autant qu’une voiture appartenant à la mère d’une des militantes est repérée sur les lieux. Des preuves un peu maigres malgré tout.
Dès le début de l’instruction du procès, l’avocat de Skoazell Vreizh, Me Le Moigne, réclame la possibilité de s’exprimer en breton, un « classique » des procès indépendantistes dont l’objectif est de politiser les affaires. Le juge applique la loi et invoque l’article 407 du code de la procédure pénale pour expliquer que l’État français ne reconnaît que la langue française comme officielle. En conséquence, le procès se tiendra en français.
Alors que le collectif Dispac’h s’attendait à un exemple, le procureur explique que les bancs des parties civiles sont déserts en dehors d’une personne qui peine à fournir un devis et qui expliquera à la barre que son agence « a eu du mal à nettoyer les dégradations ». Le procureur estime donc que les dommages ne sont pas « graves » et conteste la qualification du délit. Il demande dès lors une requalification pour passer d’une peine potentielle de 7 ans de prison et 100000€ d’amende à une peine possible d’amende et/ou de travaux d’intérêt généraux si toutefois le tribunal prononce une condamnation. Il y a eu des plaintes, mais très peu de constitution en parties civiles. Selon le procureur, seule une circonstance aggravante mérite d’être retenue : celle de la dissimulation du visage. Me Le Moigne lui rétorquera qu’une capuche n’est pas une cagoule et que le visage était bien visible même si les caméras n’ont pas pu identifier la personne qui taguait.
La prévenue est appelée à s’exprimer, mais refusera de le faire autrement qu’en breton, ce qui désolera le procureur : « il est dommage d’instrumentaliser ainsi la justice pénale. Le procureur n’a pas de client et ne défend aucune cause. Le parquet, de son côté, n’a pas accablé la prévenue pour ses opinions politiques, mais parce qu’elle avait commis un délit. On est là pour faire du droit et rien que du droit. En refusant de s’exprimer, la prévenue se prive de la possibilité de faire des travaux d’intérêts généraux puisqu’il faut son accord explicite ». Ces explications étaient surtout destinées à la salle remplie qui prenait fait et cause pour la jeune militante. Il réclame une amende de 2000 € avec sursis assortie d’une amende de 250 €.
Le porte-parole du collectif, Ewan Thébaut a témoigné à la barre pour sa camarade : « Ce sont des faits politiques que l’on va juger aujourd’hui. Aodren ne se cache pas, elle a souvent témoigné dans les médias. Notre action est un message d’alerte. La violence ne vient pas de tags, mais des résidences secondaires qui frappent de plein fouet les jeunes ».
Au final, le procès qui a duré une bonne partie de l’après-midi s’est soldée par une relaxe pour les faits de dégradation et d’une amende de 500€ avec sursis pour le refus de prélèvement d’empreinte. On parle d’engorgement des tribunaux, celui-ci aura démontré l’absurdité de ce genre de procès pour des faits insignifiants et un dossier vide.