
Lors de la 3ème journée du procès des indépendantistes catalans, les deux premiers accusés à comparaître, Oriol Junqueras, vice-président et ministre de l’Économie (ERC) du gouvernement de Carles Puigdemont, et Joaquim Forn, son ministre de l’Intérieur (PDCat), ont dénoncé avec force la dimension politique des poursuites dont ils sont l’objet.
Le premier à déclarer devant les magistrats du Tribunal Suprême a usé de son droit de refuser de répondre aux parties de l’accusation (ministère public, avocat du gouvernement et accusation populaire, le parti d’extrême droite Vox) et a répondu seulement aux questions de son avocat. D’entrée, il s’est déclaré « prisonnier politique » et a fait un discours totalement politique adressé à l’opinion publique. Il a souligné le caractère absolument pacifique et démocratique du mouvement indépendantiste et de toutes les décisions du gouvernement de Puigdemont, démentant catégoriquement les descriptions de violences inventées par les rapports des policiers espagnols et des magistrats instructeurs. Pour Junqueras « voter en aucun cas n’est un délit, en revanche empêcher un vote par des moyens violents en est un ». Le vice-président a insisté sur le fait que l’objectif politique de rechercher l’indépendance de la Catalogne ne figure pas au code pénal, que c’est un projet légitime et qu’indépendamment du résultat du procès, les Catalans et les partis indépendantistes continueront de travailler à la reconnaissance d’une république catalane. Junqueras a répété à maintes reprises le refus absolu du gouvernement espagnol de dialoguer et de répondre aux sollicitations de la Generalitat de Catalogne.
Le ministre montre la faiblesse de l’accusation
Joaquim Forn, de son côté, a choisi une défense plus technique et a accepté de répondre aux questions de l’accusation (à l’exception de l’extrême-droite). L’ex-ministre de l’Intérieur catalan a répondu point par point aux assertions du parquet et de l’État en montrant avec précision et tous les détails la faiblesse des accusations pour rébellion et sédition qui reposent sur des rapports orientés, partiaux ou clairement mensongers de la police, ou sur une présentation fallacieuse de la réalité. Ainsi le parquet qui désigne les gouvernants indépendantistes comme responsable et incitateurs de la violence des policiers contre lesquels ils auraient « lancé des murs humains ». L’ex-ministre de l’Intérieur catalan a défendu la police catalane qui est toujours intervenue avec professionnalisme, rigueur, neutralité et esprit d’apaisement, contrairement aux comportements brutaux de la Guardia Civil et de la Policia Nacional espagnole.
Le président Torra défend le comportement exemplaire des prisonniers
Le président de la Catalogne, Quim Torra a tenu au terme de l’intervention de Junqueras et de Forn à souligner le caractère « courageux et exemplaire » des prisonniers, qui n’ont pas reculé devant la justice inquisitoriale espagnole et malgré un an et demi d’incarcération abusive. Lundi 18 février, Torra se rend à Bruxelles où avec le président Carles Puigdemont, il doit tenir une conférence pour dénoncer le « procès mascarade » et lancer un appel au respect de la liberté politique en Europe et à la défense de l’autodétermination démocratique du peuple catalan. La conférence qui devait avoir lieu initialement au Parlement européen a été interdite à la suite des pressions espagnoles, et devrait se tenir dans une autre salle.
Manifestation monstre à Barcelone
Samedi 16 février, entre 200 000 (chiffre de la police) et 500 000 personnes (selon les organisateurs, Òmnium Cultural et l’ANC) ont rempli plus de 2 km de la Gran Via de Barcelone en solidarité avec les prisonniers (le même jour une « manifestation-provocation de Ciudadanos dans le village de Carles Puigdemont réunissait une quarantaine de militants). Quim Torra et toutes les autorités en tête de cortège ont répété que plus que jamais l’objectif était l’autodétermination et la République indépendante, et ont martelé que « l’autodétermination n’est pas un délit ». La prochaine échéance est la grève générale convoquée pour le 21 février et le blocage du pays. Le tout dans un contexte de tension politique croissante et de pression de la droite et de l’extrême droite qui se lancent désormais dans la campagne électorale (Pedro Sanchez a fixé les élections anticipées au 28 avril) avec l’objectif d’écarter les socialistes du pouvoir, d’incarcérer tous les dirigeants indépendantistes et de suspendre l’autonomie catalane.