De gauche à droite : Jordi Sànchez, Oriol Junqueras, Jordi Turull, Joaquim Forn, Jordi Cuixart, Roger Rull, Raül Romeva.
Le 1er décembre a été marqué par l’annonce de deux des neuf prisonniers politiques catalans de commencer une grève de la faim. Jordi Sanchez, président de l’ANC (association Assemblée nationale catalane) et Jordi Turull, ancien ministre de la Présidence du gouvernement de Puigdemont se sont lancés dans cette action pour dénoncer le blocage délibéré par la justice espagnole de leurs recours devant le Tribunal constitutionnel pour leur empêcher l’accès au Tribunal européen des Droits de l’homme.
Le même jour, une page internet ouverte pour recueillir des signatures de soutien avait recueilli plus de 150000 signatures en une douzaine d’heures. Le président de la Generalitat Quim Torra a déclaré pour les soutenir que « la justice espagnole commet l’une des pires monstruosités observées en Europe ces dernières années. » De nombreuses autres initiatives et déclarations de solidarité avec les deux prisonniers ont montré le fort impact de la nouvelle. L’information secoue le monde politique et médiatique et provoque une augmentation de la tension significative alors que nous entrons dans la dernière ligne droite avant l’ouverture des procès. Cette annonce a eu un impact considérable sur la presse catalane, espagnole et internationale. Le ministre belge de la Défense y a même déjà fait référence. Une mobilisation a été organisée devant la prison de Lledoners sous forme de campement.
Le rôle politique et partisan du Tribunal constitutionnel
Les avocats des prisonniers ont montré comment le Tribunal constitutionnel (TC) intervient directement dans le procès contre les Catalans : 8 recours ont été présentées depuis plus d’un an sans qu’aucun n’ait été encore examiné (la loi prévoit qu’on dispose de 30 jours pour le faire…). En général, le TC accepte 2 % des demandes alors qu’ici il a accepté tous les recours des Catalans. La conséquence est que, en plus de violer les droits d’accusés présumé innocents, cela porte directement préjudices à la défense des indépendantistes. Tant que le TC n’a pas traité les recours, il est impossible de garantir leur droit à accéder au Tribunal européen des droits de l’homme. La logique d’une position de répression dure et partisane de la part des institutions judiciaires et politiques espagnoles est donc toujours de mise. Le président du gouvernement espagnol a répondu immédiatement à la décision de grève de la faim en répondant simplement que les accusés « auront un procès équitable » et que la justice est indépendante (c’est à dire que les socialistes ne changeront pas la politique de répression de l’indépendantisme). Cette semaine, la justice espagnole a refusé à nouveau la récusation du juge Marchena, le juge en charge du procès contre les indépendantistes, malgré le scandale du « contrôle des procès » par les partis politiques. Amnesty International a annoncé qu’elle participerait aux procès afin d’assurer les droits et les garanties des accusés.
Madrid refuse toujours le dialogue
Le contexte politique, électoral, judiciaire tend à augmenter la tension et à durcir les positions entre les gouvernements indépendantiste des Catalans et socialiste des Espagnols. Le président Torra a refusé l’invitation de Sanchez de participer aux 40 ans de la Constitution espagnole. Le président de la Generalitat l’a justifié en disant que « la Constitution était devenue une prison ». De son côté, le gouvernement espagnol refuse de rencontrer la Generalitat et déclare qu’il n’acceptera qu’une réunion entre les présidents, ce à quoi Torre répond qu’il n’y a aucun intérêt à une réunion qui ne servirait qu’à faire une photo. En ce qui concerne les budgets, Sanchez semble avoir assumé qu’il ne pourrait pas approuver de nouveaux comptes pour 2019 sans le soutien des indépendantistes. En même temps, à Barcelone, le gouvernement catalan négocie avec les Comuns (Podemos en Catalogne) la possibilité d’un accord pour soutenir le budget catalan.
Et aussi en bref
L’ancien président Jordi Pujol a dit une cette semaine que « la Catalogne est est dans une meilleure situation aujourd’hui qu’il y a 30 ans », réaffirmant ainsi indirectement son soutien à la république et démentant les récits inventés accusant le mouvement indépendantiste des conséquences négatives qui affectent le pays. Chute importante des ventes des deux premiers journaux de Catalogne qui ont pas de positions hostiles à l’indépendance : La Vanguardia et El Periodico perdent 13 000 et 100 000 lecteurs respectivement alors que dans le même temps la presse favorable à l’indépendance gagne respectivement 6000 et 3000 lecteurs (Ara et El Punt Avui). La Caisse de solidarité (Caixa de solidaritat) a été créée et est présidée par deux anciens présidents du Parlement de la Catalogne, Ernest Benach et Núria de Gispert. Scandale provoqué par le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Borrell, qui a déclaré que « on n’a tué qu’une poignée d’Indiens en Amérique ». Il a présenté plus tard des excuses et continue d’avoir le soutien de Sanchez, en dépit également d’avoir été condamné à 30 000 euros pour avoir profité de sa position privilégiée pour vendre des actions d’Abengoa en 2015. Vendredi 30 novembre a été publié par les médias catalans la photo des 7 prisonniers de la prison de Lledoners, ensemble et souriants, en signe d’unité, de combativité des victimes de la répression et pour diffuser à la société un message sur la nécessité d’être uni pour relever les défis des semaines et des mois de lutte à venir.