Nouvelle menace de suspension de l’autonomie catalane

Quim Torra, Président de la Generalitat de Catalogne et Jean-Marc Pujol, Maire de Perpignan

L’actualité politique catalane cette semaine s’est transportée en Catalogne du Nord où le président de la Generalitat a effectué une visite officielle vendredi 31 aout. Quim Torra a été reçu par tous les hommes politiques du département – maire de Perpignan, présidente du Conseil départemental et les 99 maires qui ont signé un manifeste de solidarité avec les prisonniers politiques catalans – ainsi que par de nombreuses organisations nord-catalanes, comme les présidents des clubs de rugby, l’USAP et les Dragons Catalans, les écoles catalanes et les responsables des associations catalanes.

Dans la capitale de Catalogne Nord catalan, le président catalan a reçu la médaille d’or de la ville en solidarité avec les prisonniers et exilés politiques poursuivis par la justice espagnole des mains du maire Jean-Marc Pujol qui arborait un ruban jaune, symbole de la liberté des prisonniers. Quim Torra était venu inaugurer une exposition de photos sur les violences policières lors du référendum du 1er octobre à la Casa de la Generalitat à Perpignan, la délégation du gouvernement catalan en Catalogne du Nord et l’exposition « 55 urnes pour la liberté » du Comité de Solidarité Catalane de Perpignan présentée à la Maison de la Catalanité du Conseil départemental. Tout au long de la journée, il a été accompagné de nombreux manifestants qui ont tenu à montré le soutien et la solidarité de la Catalogne Nord.

Nouvelle menace de suspension de l’autonomie

Le jour même, le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, lançait une nouvelle menace de suspension de l’autonomie catalane si les Catalans venaient à prendre des décisions unilatérales contraires à la légalité espagnole. Menaces auxquelles le président Torra a immédiatement répondu en disant qu’il serait toujours du côté de l’obéissance au peuple catalan. Le président du gouvernement catalan a saisi l’occasion pour dire qu’il espérait, lors de sa rencontre avec son homologue espagnol au mois d’octobre, que Madrid feraient enfin une proposition politique pour résoudre la crise ; il a ajouté que les Catalans partent toujours du principe que le référendum d’indépendance du 1er octobre a été gagné et que la déclaration de la République le 27 octobre 2017 a bien eu lieu. Au cours de la semaine, le président catalan a également informé Madrid qu’il n’accepterait pas une condamnation des indépendantistes lors des procès qui aura lieu cet automne.

Les provocations permanentes des espagnols de rue

Pendant ce temps, toute la semaine a été monopolisée – dans les médias – par la polémique permanente des rubans jaunes, symboles de la revendication de liberté des prisonniers politiques. Ciudadanos, le PP et l’extrême-droite n’ont eu de cesse de provoquer des incidents dans les rues, de dénoncer la police catalane qui procède à des contrôles d’identité des commandos espagnolistes cagoulés qui font la chasse aux rubans jaunes, d’exiger la suspension de l’autonomie catalane, de répandre des mensonges éhontés pour essayer de discréditer les indépendantistes (le dirigeant du PP, Casado, a déclaré que l’indépendantisme en Catalogne a toujours été violent). Les espagnolistes demandent encore que l’expression « politisée » soit interdite dans les espaces et les bâtiments publics. Le résultat de ces campagnes est que plus les rubans jaunes sont retirés, plus la population en remet dans les rues. Une manifestation de Ciudadanos a même été l’occasion d’une agression de d’un cameraman de TV Madrid par des manifestants espagnolistes qui l’a confondu avec TV3, la télévision catalane. Le parti populiste a indiqué qu’il ne pas plainte parce que l’acte ne constitue pas une incitation à la haine… D’autre part, la justice espagnole a ouvert une procédure contre la police catalane pour abus de pouvoir et « discrimination » au motif qu’elle contrôle les identités de personnes cagoulées qui enlèvent des rubans jaunes dans la rue. La Generalitat a demandé au gouvernement espagnol de faire cesser ces enquêtes contre la police catalane et a réaffirmé que la sécurité publique est compétence exclusive de la police catalane qui poursuivra son travail.

Puigdemont en visite en Écosse

Pour sa part, le président Carles Puigdemont a effectué le dimanche 26 aout une visite à Édimbourg en Écosse pour un forum, où il a participé à une conférence intitulée « Where Now For Catalonia and Europe » ; il y a défendu la République catalane : « Nous ne suspendrons jamais la déclaration d’indépendance du 27 octobre ». Et il a ajouté que pour parvenir à l’indépendance de la Catalogne, sont indispensable « les citoyens, les droits de l’homme et le respect mutuel ».

Le juge Llarena devant les tribunaux belges

Au chapitre judiciaire, le gouvernement espagnol a annoncé qu’il avait engagé des avocats belges pour défendre le juge instructeur des procès contre les indépendantistes (pour plus d’un demi-million d’euros), Pablo Llarena, accusé par Puigdemont d’irrégularités et de partialité et qui est convoqué devant la justice en Belgique. Les médias ont avancé que cette procédure contre le magistrat pouvait entraîner qu’il soit écarté des procès qui doivent se tenir cet automne. Devant les prisons catalanes où les leaders politiques indépendantistes sont enfermés, des centaines de manifestants continuent de se mobiliser tous les jours en solidarité avec les inculpés pour rébellion : tracteurs, sportifs et membres des CDR – les comités de défense de la République.

> Alà Baylac Ferrer

Contributeur. Maître de conférence à l’Université de Perpignan – Via Domitia (UPVD) en Catalogne du Nord, Alà Baylac Ferrer est spécialiste des langue et culture catalanes. Il est par ailleurs directeur de l’Institut franco-catalan transfrontalier (IFCT). [Lire ses articles]