Faut-il participer aux commentaires autour de la démission de Nicolas Hulot, Ministre de la transition écologique, du gouvernement ? Oui. Pour la simple et bonne raison que cette annonce surprise sur France Inter était assortie d’un bilan : la politique des petits pas n’est pas assez ambitieuse !
« Non ! Je ne comprends pas que nous assistions, globalement, les uns et les autres, à la gestion d’une tragédie bien avancée dans une forme d’indifférence ». Devant un Nicolas Demorand et une Léa Salamé sans voix, Nicolas Hulot a annoncé en direct sa démission du gouvernement. Une démission qui, visiblement, n’avait rien de préméditée. L’ex-ministre a avoué son isolement : « je suis tout seul à la manœuvre », « où sont mes troupes ? » ou encore « ai-je une société structurée pour défendre les enjeux écologiques ? Ai-je un parti politique ? ». Paradoxalement, c’est en démissionnant que son isolement change de camp : aujourd’hui, les membres du gouvernement sont bien embarrassés pour se faire les chantres de la « transition écologique ». Et même si Nicolas Hulot affirme que la France fait plus que les autres, il devient difficile, sur les questions écologiques, de donner une quelconque crédibilité à ce gouvernement.
Sincère, Nicolas Hulot a listé les combats qui n’ont, selon lui, toujours pas commencé : la lutte contre le changement climatique, l’enrayement de l’érosion de la biodiversité, la lutte contre les pesticides… « Est-ce que les petits pas suffisent ? La réponse est non » a-t-il asséné. Son analyse est encore juste lorsqu’il déclare qu’« on s’évertue à entretenir, voir à réanimer, un modèle économique marchand qui est la cause de tous ces désordres ». Mais quelle naïveté d’avoir cru qu’un gouvernement néo-libéral puisse agir concrètement dans le domaine environnemental ! Depuis toujours, l’écologie est le point faible de la pensée néo-libérale. L’un est conscient de la finitude du monde, de la raréfaction des ressources et impose d’imaginer un système sobre, l’autre fait reposer au contraire toute son analyse sur la croissance, y compris pour le financement du modèle social. La technique des « petits pas » est une façon habile mais usée de ne pas prendre de décisions importantes, décisions qu’imposent pourtant la crise climatique que nous vivons. Ménager la chèvre et le chou permet sans doute de ne froisser personne, mais cela ne contente personne non plus !
La démission de Nicolas Hulot n’est au final pas une surprise. Mais elle confirme juste qu’il est temps de changer de logiciel, principalement économique. Et parmi les décisions radicales à prendre, il ne faudrait pas oublier la réforme institutionnelle dont le débat s’est arrêté suite à l’affaire « Benalla » cet été. Car ceux qui prétendent agir efficacement pour l’écologie de façon autoritaire, en « planifiant » dans un État hypercentralisé, se trompent. Plus que jamais, on ne peut être écologiste sans être autonomiste !
Depuis plusieurs heures, la communication des députés macronistes a reprise sur le mode « jamais aucun gouvernement n’avait fait autant ». Et pourtant, force est de constater que les pesticides sont toujours utilisés, que contrairement à ce qui est annoncé, l’exploitation des hydrocarbures a toujours cours et qu’il s’agit de l’arrêter « progressivement, à l’horizon 2040 » (quand les puits seront vides ?), que le nucléaire n’est pas remis en question, que rien n’est fait pour préserver la biodiversité… « J’ai un peu d’influence, je n’ai pas de pouvoir », s’est défendu Nicolas Hulot. C’est justement le problème : quand un ministre ou un député vous dit qu’il n’a pas de pouvoir, soit il ment, soit il y un vrai problème démocratique en France. Car les élus locaux, eux, n’ont réellement pas de pouvoir. « Qui gouverne ? » s’interroge l’ex-ministre. Les lobbies, aidés qu’ils sont par des responsables politiques néo-libéraux pour qui, au final, c’est le marché qui régule et non la politique !
Nicolas Hulot a cependant eu raison sur un point durant cette émission : cet échec n’incombe pas uniquement au gouvernement, il incombe à l’ensemble de la société, incapable de faire des choix tranchés sur ce sujet majeur qu’est l’écologie, incapable de s’engager concrètement dans l’action collective. Pourtant, on peut être radical sans être violent : la politique, c’est d’abord une question de choix.