Alors que se profile l’extinction de masse en matière de populations animale et végétale « sauvages », conséquence inéluctable de la colonisation désormais quasi-irréversible et quasi-échue de la planète Terre par une espèce invasive, qui plutôt que de s’interroger sur sa propre étendue et finalité, s’est lancée aveuglément dans une domestication effrénée des autres espèces qu’elle veut croire inférieures et ce, à grand renfort de nécrotechnologies, pesticides et autres artefacts de manipulation du vivant, quelques rescapé(e)s, aux confins de ce continent européen qui s’est donné pour unique vocation celle de conquérir, de coloniser et de soumettre le reste du monde « non-civilisé », vocation réactualisée par l’Esprit de Lisbonne, s’entêtent, à raison, à vouloir faire des démonstrations mathématiques en basque et en breton.
Certains ont pu croire, à la fin des années 1970 et grâce sans doute aux mirages des Trente Glorieuses, que la décolonisation était devenue une réalité : C’était se méprendre sur la véritable nature de la colonisation, qui, si vous l’observez avec les lunettes marxistes adéquates, se révèle être réellement l’outil de base et fondamental du capitalisme. Accroître le nombre de sujets, c’est in fine accroître le nombre d’esclaves et de clients, les premiers pouvant se métamorphoser en les derniers à condition que se développe une certaine « symbiose » que d’aucuns tiendront pour raisonnable (le type de « symbiose » ou de « mutualisme » que l’on peut déceler entre une population de fourmis et une population de pucerons, i.e., à condition que chacun garde son rang). Et pour faire avaler le tout, le colonialisme dispose d’un socle scientifiquement élaboré, c’est le racisme, l’indispensable ordination du vivant en bonnes espèces et mauvaises herbes de sous-espèces, qui l’autorise voire le justifie pour le plus bien de la « civilisation » (1).
Certains esprits « éclairés » (2) sans aucun doute par Les Lumières d’antan, s’offusquaient déjà à la fin des années 90 du type de « servitude volontaire » que constituait l’acceptation du franglais, voire de « l’american way of spirit life in english of course », par les « élites » françaises, l’acceptation in fine de leur sous-condition face à l’hégémonique Union des États d’Amérique. Il ne leur était pas venu à l’idée qu’une telle sous-condition était pourtant celle là-même qu’eux-mêmes faisaient subir aux petits Basques ou aux petits Bretons. Comme le répètent pourtant les lycéen(ne)s de Diwan à Carhaix, en cette fin de juin 2018, en breton comme en français : 4 + 1 = 5 ! Et si les chiffres arabes sont moins arabes qu’il n’y paraît, car d’abord d’invention indienne et puis seulement récupérés ensuite dans leur suite de 0 à 10 par Al-Khwarizmi, ils n’en servent pas moins aux algorithmes basques comme bretons. Et ils ont raison de se battre ces 15 jeunes du lycée Diwan, comme les 79 du lycée de Seaska à Bayonne, pour que la biodiversité humaine ne soit réduite à néant par les thuriféraires du capitalisme que celui-ci soit national ou international.
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(1) Pietro Basso, Le racisme européen : critique de la rationalité institutionnelle de l’oppression, Éditions Syllepse, 314 p., 2016
(2) Bernard Cassen (2000) La langue-dollar, Le Monde diplomatique, mai 2000 www.monde-diplomatique.fr