Le président du Parlement de Catalogne, Roger Torrent, qui avait initialement convoqué la cérémonie d’investiture du président de la Generalitat le lundi 12 mars, a dû suspendre la réunion en raison de la décision du Tribunal Suprême espagnol de refuser que le candidat à la présidence, Jordi Sànchez, sorte de prison. En conséquence, ses avocats ont déposé une plainte ce lundi 12 mars devant les tribunaux avant d’aller devant la Cour européenne des droits de l’homme pour demander le respect des droits civiques du candidat et de la démocratie. En attendant la décision, le président du Parlement a suspendu la séance d’investiture.
L’argument donné par le juge du Tribunal Suprême, Pablo Llarena, pour refuser la liberté à Jordi Sànchez, suit la même ligne de persécution judiciaire des idées indépendantistes. De nombreux juristes catalans et espagnols remettent de plus en plus en question l’absence de base légale des décisions des juges espagnols et dénoncent la violation des principes de base de la justice et de la démocratie. Des plaintes pourraient être présentées contre le juge pour prévarication. Le juge Llarena donne comme motif pour la détention préventive du candidat à la présidence de la Catalogne que sa libération est susceptible de générer un désordre public violent et conduire à une réitération de la tentative d’obtenir l’indépendance de la Catalogne par des moyens illégaux. Les deux arguments sont d’autant plus surprenants que le président de l’ANC emprisonné a toujours agi pacifiquement et qu’il n’a participé à aucune des décisions relatives au vote de l’indépendance par le Parlement dans la mesure où il n’était pas alors député. Le juge ajoute – comme s’il avait le pouvoir d’un commissaire politique – que Junts per Catalunya (groupe parlementaire de Carles Puigdemont) a d’autres députés et que le Parlement peut choisir d’autres candidats. Et en tout cas, que Jordi Sànchez peut déléguer son vote, depuis la prison. Les partis indépendantistes ont dénoncé l’ingérence du pouvoir judiciaire dans la politique ; il n’y a pas de base légale pour qu’un tribunal impose des conditions à l’exercice de la démocratie selon ses critères et encore moins pour décider qui peut être candidat et président d’une autonomie.
5 mois de prison (préventive) pour les prisonniers politiques
Il y aura bientôt cinq mois que les prisonniers politiques catalans sont retenus à Madrid. Le tribunal ne prévoit pas de les libérer ni de les rapprocher dans des prisons catalanes et a étendu l’instruction de l’affaire à un an et demi en raison de la « complexité de l’affaire ». Deux sont membres de l’ex-gouvernement de Catalogne, le vice-président Oriol Junqueras et le ministre de l’Intérieur Joaquim Forn (en prison depuis le 2 novembre), et deux sont les présidents des plus grandes organisations civiques de Catalogne, favorables à l’indépendance, Jordi Cuixart d’Òmnium Cultural et Jordi Sánchez de l’ANC, l’association Assemblée nationale catalane (depuis le 16 octobre). Deux, en outre, Junqueras et Sànchez, sont actuellement membres du Parlement de Catalogne. Mais les tribunaux espagnols ne reconnaissent pas leur immunité.
Les socialistes continuent à pousser le PP
Face à une perspective d’impossibilité de former un gouvernement qui puisse reprendre ses fonctions d’administration de l’autonomie de la Catalogne, les socialistes ont encore accru la pression, appelant le Tribunal Constitutionnel à ordonner que le compte à rebours qui déclencherait, faute de pouvoir élire un président de la Generalitat, de nouvelles élections dans les deux mois. Ils continuent ainsi à soutenir le PP et la suspension de l’autonomie, et appuie la campagne contre l’indépendantisme et le contrôle de l’autonomie par les autorités espagnoles.
Persécution administrative des entreprises et des journalistes
D’autre part, les médias catalans ont dénoncé cette semaine la décision du ministère espagnol des Finances d’exiger à une centaine d’entreprises, d’associations et de journalistes les justificatifs et les raisons des aides et subventions légalement attribuées par le gouvernement catalan. Les journaux catalans ont commencé à parler de « chasse aux sorcières ». Le ministère espagnol reconnaît lui-même qu’étant donné l’impossibilité de prouver que la Generalitat n’a pas dépensé un seul euro pour l’organisation du référendum sur l’indépendance le 1er octobre 2017, ils cherchent maintenant à impliquer des professionnels et des associations. Malgré le manque de compétence juridique pour demander ces justificatifs, le gouvernement espagnol agit dans le cadre de la mise sous contrôle des finances du gouvernement catalan, indépendamment de la suspension de l’autonomie.
Négociation, manifestation et organisation
Pendant ce temps, ce dimanche, l’ANC a convoqué à Barcelone une manifestation pour presser les partis indépendantistes d’arriver à un accord pour désigner un gouvernement qui travaille à la mise en œuvre de la République. Dans le même temps, la négociation entre les trois partis se poursuit. ERC et Junts per Catalunya se sont déjà mis d’accord sur une feuille de route et la candidature de Jordi Sànchez, alors que le CUP continue de le discuter, refuse de l’approuver et use de ses 2 votes indispensables, pour bloquer l’investiture du président de Catalogne. À Bruxelles, le président Carles Puigdemont et les ministres en exil organisent le fonctionnement du Conseil de la République. D’autre part, l’ancienne ministre catalane de l’enseignement, Clara Ponsatí, a informé qu’elle était retournée vivre en Écosse où elle a retrouvé son poste de professeur d’économie à l’Université de Saint Andrews et va ouvrir « un nouveau front international » pour la défense de la Catalogne.