Les médias catalans se font écho des négociations discrètes qui ont lieu entre les partis indépendantistes – Esquerra Republicana de Catalunya (ERC, Gauche Républicaine de Catalogne), Junts per Catalunya (coalition du Partit Demòcrata Europeu Català – Parti Démocrate Européen Catalan, PDeCat, issu de la recomposition de la Convergència Democràtica de Catalunya des années Jordi Pujol – et de personnalités de la société civile) et la Candidatura d’Unitat Popular (Candidature d’Unité Populaire, CUP) afin de constituer le bureau du nouveau Parlement de Catalogne issu des élections du 21 décembre. L’élection de la personne qui présidera le parlement (et son bureau) est l’étape préalable (clé) pour ensuite procéder à l’élection du président de la Generalitat et à la formation du gouvernement (le Consell executiu).
L’expectative et la diversité des pronostics sont d’autant plus grandes que de la capacité des indépendantistes à s’entendre d’une part, mais aussi à construire un dispositif gouvernemental effectif, dépend la fin de la suspension de l’autonomie catalane. Les jeux sont très ouverts dans la mesure où de nombreux facteurs interviennent dans une équation à plusieurs inconnues. Comment former un gouvernement avec des élus emprisonnés ou exilés sous la menace de mandats de détention ? Le Parlement peut-il fonctionner avec des députés « virtuels » mais physiquement absents ? Le président catalan prendra-t-il le risque de revenir à Barcelone ? Le gouvernement espagnol ne va-t-il pas suspendre la formation du gouvernement catalan si celui-ci est formé « à distance » ? Les autorités de Madrid engageront-elles un dialogue politique après leur défaite aux élections ?
Les partis indépendantistes sont unanimes toutefois sur l’objectif : rétablir dans ses fonctions le président destitué, même s’il devait être une voix extérieure, et continuer la bataille institutionnelle et politique pour la reconnaissance de la République proclamée le 10 octobre 2017.
Le mardi 9 janvier en tous cas, le président de la Generalitat, Carles Puigdemont, conviait à Bruxelles les élus têtes de liste de Junts per Catalunya, ainsi que les responsables de l’ANC et d’Òmnium Cultural (remplaçants des présidents emprisonnés) et plusieurs députés. Preuve que les discussions pour former le nouvel exécutif vont bon train. Vendredi 12 janvier le président catalan réunira à Bruxelles tous les députés de Junts per Catalunya (à l’exception des prisonniers Jordi Sanchez, président de l’Assemblea Nacional Catalana – ANC – et Joaquim Forn, ministre de l’intérieur du gouvernement catalan destitué par Madrid), soit cinq jours avant la session d’ouverture du Parlement, fixée par le gouvernement espagnol le 17 janvier.
D’autre part, la présidente et le bureau en fonction du Parlement de Catalogne ont présenté un recours devant le Tribunal Constitutionnel contre les mesures d’exception (article 155) prises par le gouvernement espagnol, sur la base d’un rapport des juristes du même Parlement (Consell de Garanties estatutàries – Conseil de garanties du Statut [d’autonomie]) qui indiquent que la destitution de la Generalitat ne constituait pas une « mesure nécessaire ni indispensable » à l’application de l’article en question.