La Commission européenne (CE) avait déjà subit un échec le 4 octobre quand le Parlement avait refusé l’emploi d’un certain nombre de molécules connues comme perturbateur endocrinien. Le 26 octobre, la Commission a subit un nouvel échec, ou plutôt pour l’instant un demi-échec.
La dite Commission dont on sait qu’elle est soumise à la pression de nombreux lobbies dont bien sûr Monsanto, voulait initialement autoriser le renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour 10 ans. Devant la levée de boucliers, la CE a alors proposé un renouvellement pour une période de 5 à 7 ans. Mais les États membres de l’UE n’ont pas réussi à dégager une majorité qualifiée sur cette proposition (l’Allemagne et le Portugal se sont abstenus sur les 10 ans, 16 pays ont voté pour, et la France, la Grèce, la Croatie, l’Italie, le Luxembourg, Malte, l’Autriche, la Slovénie et la Suède ont voté contre). Le vote du Parlement est remis au moins pour l’instant au 6 novembre. La pression vient du fait que l’autorisation du glyphosate expire fin décembre.
On ne va pas ici refaire toute l’histoire du glyphosate, juste rappeler que la molécule est qualifiée de cancérogène ou suspectée de l’être par de nombreux scientifiques et que des commissions financés par des grosses firmes assurent du contraire. Monsanto, après avoir abandonné sa publicité de désherbant biodégradable et sans danger pour l’environnement (biodégradabilité de 2% au bout de 28 jours, chiffre admis par la firme), publiait à un moment sur son site que le glyphosate a « une toxicité nettement moins élevée que la cafeïne ou le sel » !
Ce qu’on oublie souvent de dire, c’est que l’on mélange pour usage la glyphosate à des adjuvants beaucoup plus dangereux que lui. D’autre part, « Générations futures » a testé 30 aliments, 12 a base de légumineuses et 18 aliments à base de céréales. Résultats : 16 sur 30 contenaient du glyphosate. Et dans le nombre, sur 8 céréales pour le petit déjeuner surtout utilisées par les enfants, 7 avaient des traces de glyphosate !
En attendant le prochain vote, quelle est la position de la France ? Ou plutôt quelles sont les positions françaises ? Sans surprise, La FNSEA ne cache pas son souhait d’un renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour 10 ans. Stéphane Le Foll, ancien ministre PS de l’agriculture, estime lui « que l’interdiction du glyphosate se fait pour de mauvaises raisons. » Le principe de précaution serait-il une mauvaise raison ?
À la question de Ouest-France « La France s’opposera donc à un renouvellement au niveau européen ? », Nicolas Hulot répond (25 octobre) : « la réponse est oui, car nous devons nous inscrire dans un parcours de sortie le plus rapide possible des produits les plus dangereux. »
Alors que deux jours avant, le Figaro écrivait : « le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a proposé aujourd’hui de limiter à « trois ans » le renouvellement au niveau européen du glyphosate, herbicide controversé dont l’autorisation dans l’UE expire à la fin de l’année, le temps de « regarder tout ce qu’on peut trouver en termes d’alternative ». Position ambiguë : comment s’opposer au renouvellement tout en l’autorisant pour 3 ans ?
54 des 310 députés de La République en marche (REM) ont lancé un appel dans une tribune au Monde : « Nous, députés de La République en marche, demandons une interdiction de la commercialisation du glyphosate et de son utilisation le plus rapidement possible. Nous estimons que ce produit nocif, aujourd’hui largement utilisé, doit être abandonné. » Parmi les 54, on trouve Sandrine Le Feur, députée de la 4ème circonscription du Finistère, celle de Morlaix, et agricultrice bio. Elle a réussi l’exploit de battre en juin dernier Maël de Calan, figure des Républicains et qui fait partie des candidats à la présidence de ce parti.
Pour rester dans le Finistère, Richard Ferrand, qui était à l’origine de la candidature de Sandrine Le Feur, est beaucoup moins catégorique, puisqu’il dit dans Le Télégramme (29 octobre) que « la France ne votera pas pour le renouvellement de 10 ans du glyphosate. » Ce qui est évident puisque la CE est revenue en arrière en proposant 5 à 7 ans ! Puis il précise que « pour relativiser, il faut rappeler que cela représente 200 tonnes par an dans le département. » Relativiser avec 200 tonnes ? On estime à 8000 tonnes le glyphosate utilisé chaque année en France, sur un total de 66000 tonnes de pesticides (1kg tous pesticides confondus par habitant), c’est plus de 500 tonnes en Bretagne. Avec 200 tonnes, le Finistère en consomme plus que sa part (4,5kg/habitant rien que pour le glyphosate !).
Alors que faire si on interdit le glyphosate ? Il existe un certain nombre d’alternatives, mais encore faut-il les concrétiser. Pour rester sur le terrain breton, il y a des années que l’entreprise Osmobio de Loudéac travaille dans ce sens. Et cette semaine, Le Télégramme titrait à propos de cette entreprise « Une alternative voir le jour à Loudéac » alors que Ouest-France plus catégorique titrait « L’entreprise Osmobio a trouvé la solution alternative au glyphosate ». Piste intéressante à suivre en tout cas…