Au lendemain d’un vote crucial pour l’avenir de la Catalogne, l’opinion internationale se divise entre ceux qui pensent que le scrutin est légitime et ceux qui restent campés sur l’illégalité de ce dernier. Avec 42,3 % de participation malgré la confiscation d’urnes et de bulletins de vote, la fermeture d’imprimeries, l’occupation de bureaux et de la rue par la police, on peut pourtant estimer sans problème la légitimité de ce référendum catalan pour l’autodétermination.
Carme Forcadell, la présidente de l’Assemblée catalane, a reçu il y a quelques jours le prix Coppieters délivré par la fondation du même nom dont fait partie Le Peuple breton. À cette occasion, Philippe Fouler et Anne Douchet de l’UDB, ont pu échangé avec elle : « Plus d’un million de personnes ont su manifester en Catalogne sans violence et c’est déjà un fait extraordinaire comme expression de la démocratie. Mais le gouvernement espagnol n’accepte aucun dialogue, la réponse est toujours « non » à nos propositions. Ils veulent nous réduire au silence et criminaliser la voix des citoyens Catalans. L’Espagne utilise aussi les forces de police pour fabriquer des accusations fausses et veut discréditer à tout prix nos politiciens. Le but est clair : assimiler le vote à un crime et arrêter l’autonomie de la Catalogne en confisquant la démocratie » a-t-elle déclaré.
Avec plus de 2,2 millions de votants pour 90 % de « oui » à l’indépendance malgré la répression de la police espagnole, difficile de faire comme si ce référendum n’existait pas. C’est pourtant bel et bien ce qu’a affirmé Mariano Rajoy, le chef du gouvernement espagnol, membre du Parti Populaire : « il n’y a pas eu de référendum d’auto-détermination aujourd’hui en Catalogne. (…) Aujourd’hui, (…) il y a eu une mise en scène de ceux qui sont contre la démocratie et la légalité ». La droite espagnole rappelle tristement son héritage franquisme. « Ils nous ont obligé en maintenant cette farce, la police n’a fait que son travail », réplique Mariano Rajoy aux critiques contre les violences policières.
L’attitude du gouvernement est si consternante qu’elle a poussé ceux qui étaient plutôt opposés à la tenue du référendum à le défendre aujourd’hui. C’est le cas notamment d’Ada Colau, maire de Barcelone : « ce qui est arrivé aujourd’hui [le 1er octobre] n’a pas de nom et transgresse toutes les lignes rouges ». De son côté, Jean-Luc Mélenchon a tweeté que « l’État espagnol perd son sang-froid. La nation ne peut être une camisole de force ». Des propos que l’on peut juger opportunistes de la part de quelqu’un qui ne reconnaît pas l’existence même du peuple catalan ! Au sujet des ordonnances, ce dernier a d’ailleurs tweeté que, pour lui, « c’est la loi au-dessus du reste en République ». Dans un État de droit, cette position est tout à fait défendable, mais cela condamne aussi à l’immobilisme car dès lors que les lois sont injustes et la Constitution écrite par un seul peuple, qui défend les minoritaires ? Marta Rovira, secrétaire générale d’Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), a d’ailleurs, demander « l’intervention de l’Union européenne pour protéger les droits fondamentaux des citoyens » que la légalité espagnole met à mal.
Ce dimanche, la France a brillé par son silence. Si la position officielle était de « ne pas intervenir dans les affaires intérieures » de l’Espagne, on ne comprend pas bien alors pourquoi le président Emmanuel Macron a contacté le chef du gouvernement kurde d’Irak, Massoud Barzani, pour lui demander de repousser son référendum peu avant sa tenue. Tout concourt au contraire à croire que les États-nations sont un club cherchant à rester le plus restreint possible. La position est d’autant plus paradoxale que la France se targue constamment d’être une « République » et qu’elle soutient une monarchie contre la constitution d’une nouvelle République.
En Catalogne, le président Charles Puigdemont a annoncé que la Catalogne avait gagné le droit de devenir un État à part entière. Il va transmettre « dans les jours qui viennent » les résultats du référendum « au parlement, garant de la souveraineté de notre peuple, afin qu’il puisse agir conformément à la loi référendaire ». La procédure annoncée clairement lors des dernières élections suit donc son cours. Plusieurs organisations indépendantistes ont également annoncé une « grève générale » demain pour dénoncer l’attitude de la monarchie espagnole.