Le programme fiscal exposé par le nouveau gouvernement comporte des innovations qui sont toutes présentées comme des mesures d’allègement ou de simplification. Mais comme les programmes de ses prédécesseurs, il n’insiste pas trop sur les transferts de charge entre contribuables ni sur d’autres effets désagréables.
C’est dommage pour la clarté de la démarche, dont on peut dire à l’examen qu’elle va plutôt dans le sens du soutien aux catégories sociales et aux régions les plus favorisées.
Ainsi, l’exonération de la taxe d’habitation est perçue comme un allègement mais, en fait, cette exonération privera les collectivités locales d’une ressource dont elles ont une relative maîtrise. Si elle est compensée exactement, le coût sera facturé aux débiteurs d’autres impôts ou taxes, dont le choix et la répartition échapperont aux élus locaux. Et si elle n’est pas compensée ou est moins que compensée, ce sera au détriment de services rendus jusque là à la population.
Le basculement sur la contribution sociale généralisée (CSG) de la part salariale des cotisations maladie et chômage profitera certes aux salariés actifs, mais pas aux retraités, soumis à la CSG, qui ne touchent pas tous des retraites dorées. Les retraités qui quittent la région parisienne pour regagner pas exemple leur Bretagne natale seront d’un apport moins grand pour une région dont ils augmentent les charges. L’Île-de-France, dont les actifs même bien ou très bien payés bénéficient des réductions de cotisation sociales, verra les siennes allégées.
La baisse importante des prélèvements sir les revenus de l’épargne bénéficiera à ceux qui peuvent épargner le plus, c’est à dire aux plus gros revenus, et aux régions où ces gros revenus sont nombreux. L’Île-de-France est encore la principale gagnante.
La nouvelle baisse de l’impôt sur les sociétés (IS), dont le taux est ramené à 25 % (il était encore de 50 % en 1985), bénéficiera aux actionnaires, dont les revenus sont principalement les dividendes distribués après paiement de l’IS. Comme on le sait, c’est encore en Île-de-France que les bénéficiaires de dividendes sont les plus nombreux et les mieux dotés. On a rarement vu les salaires bénéficier de la baisse de l’IS…
La transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière exclut désormais de la base de cet impôt les actifs mobiliers que sont les actions. Une fois encore au grand soulagement des actionnaires, dont on a déjà rappelé la forte concentration en Île-de-France. Mais les détenteurs d’actifs immobiliers (propriétaires d’immeubles) ne s’inquiètent pas vraiment : leurs biens immobiliers peuvent sans difficulté être transférés à une société dont ils seront les actionnaires… non soumis à l’ISF. La réforme de l’ISF pourra sans doute avant longtemps être analysée comme une suppression de fait de cet impôt !
Il reste quelques chapitres à traiter, mais cette première approche montre clairement que, pour l’essentiel, les changements qui vont affecter la fiscalité française dans les mois et années à venir sont favorables aux moins démunis et aux régions où ils sont le plus concentrés.
La « révolution » de M. Macron aura semble-t-il l’intérêt non négligeable de « casser » un système politique clanique devenu insupportable. Mais on est en droit de craindre qu’il ne remette pas le moins du monde en cause les grandes lignes de la politique mise en œuvre par ces clans pour le plus grand bénéfice de l’oligarchie française (groupe restreint des élites fortunées et de leurs « grands valets » (mevel bras)).