Lors de chaque élection se repose toujours logiquement la question du vote blanc. « Voter blanc indique une volonté de participer au débat démocratique mais marque un refus des choix proposés. Ce type de vote est clair et n’autorise qu’une seule interprétation : je veux participer mais ce que vous me proposez ne me convient pas. En d’autres termes, le vote blanc doit posséder un pouvoir invalidant permettant de révoquer une offre politique qui serait jugée inappropriée ». Tout semble dit – dans sa définition et sa conséquence – dans cette phrase empruntée au… Parti du Vote Blanc. Force est de constater que cette revendication du vote blanc semble aller vers plus de démocratie mais examinons de plus près la situation.
En France, le vote blanc bénéficie d’une demi-reconnaissance : il est clairement indiqué dans un premier temps, mais ne fait pas partie des votes exprimés. De sorte qu’ à terme, il est traité comme les votes nuls et les abstentions. La conséquence mathématique est qu’un vote blanc qui veut marquer un refus des choix incarnés par les candidats se trouve réparti entre ces candidats au prorata des résultats obtenus. Alors, quel est l’intérêt profond de cette demi-reconnaissance ?
Sans doute convient-elle, pour l’heure, à cette république française qui est bien une république des apparences. Et certains pourront sans doute répondre que si ce droit n’est pas utilisé, il finira par disparaître. Mais, on pourra aussi avancer sans crainte que parmi les abstentionnistes, il y en a aussi une bonne part qui s’intéresse sérieusement à la politique et que cette possibilité de vote blanc ne les intéresse pas, justement parce qu’elle ne l’est qu’à moitié. Ainsi, le sens du vote blanc se trouve dévoyé.
Pour autant, faut-il aller vers une reconnaissance pleine et entière du vote blanc ? Cela suppose à l’évidence de revoir certaines règles.
La loi prévoit aujourd’hui l’accès au financement public pour les partis réussissant à obtenir au moins 1 % des voix dans au moins 50 circonscriptions. Par ailleurs, il faut atteindre 5 % des suffrages exprimés pour être remboursé de ses frais. Dès lors, la reconnaissance du vote blanc sans changement de règles se ferait au détriment des plus petits partis (qui atteindrait plus difficilement encore les 1 %), ce qui n’aurait rien de plus démocratique. Nécessairement, il faudrait revoir les quotas à la baisse (et on pourrait aussi au passage en profiter pour instituer une dose de proportionnelle). De plus, il faudrait admettre avec le vote blanc exprimé que les élections puissent être annulées dès lors que celui-ci obtiendrait plus de 50 % des suffrages. Et plus encore que l’élection ne soit valable qu’avec un quorum minimum. Le vote blanc exprimé fournirait effectivement l’avantage de la transparence, mais pourra-t-on considérer comme légitime quelqu’un élu avec seulement 30 % des suffrages exprimés ?
Enfin – et ce n’est pas le point le moins important – il faut se poser la question, comme corollaire au vote blanc comme suffrage exprimé, le vote obligatoire. Car c’est dans de telles conditions, en réalité, que le vote blanc prendrait toute son importance et permettrait à chacun de faire entendre sa voix, y compris les abstentionnistes politisés.
Alors oui sans doute à la reconnaissance pleine et entière du vote blanc, mais avec les conditions évoquées ci-dessus.