Que faire des préfets ?

bonne année préfecture

L’État en France est incroyablement hypocrite. Alors que le pouvoir est concentré à Paris et que celui-ci s’exerce de façon autoritaire, c’est-à-dire depuis le haut, il a créé à partir de 1982 des « collectivités territoriales », mettant fin au contrôle a priori des préfets sur les décisions des collectivités. Toute démocratie suppose un contre-pouvoir et la création de ces collectivités territoriales – notamment à partir de 1986 date à laquelle les premières élections régionales se sont tenues puis de 2004 avec le transfert de diverses compétences – a suscité un enthousiasme qui s’est traduit par des taux de participation aux élections relativement élevés. Mais c’était sans compter sur la duperie qu’a constitué cette soi-disant « décentralisation » ! Les collectivités territoriales sont en effet des organismes de gestion à qui on a transféré des « compétences » et non du « pouvoir ». En termes plus clairs, elles disposent de marges de manœuvre pour appliquer des décisions venues de Paris, mais n’ont pas le pouvoir de légiférer sur ces compétences et ainsi d’adapter des politiques aux spécificités de leur territoire. La participation électorale a depuis chuté preuve que l’électorat n’est pas dupe du manque de pouvoir de ces « collectivités territoriales » et donc de leur incapacité à changer leur quotidien.

Les collectivités territoriales n’ont donc jamais constitué un réel contre-pouvoir à la toute puissance de l’État comme cela se fait ailleurs (autonomies au Royaume-Uni et en Espagne, États fédérés en Allemagne, fédéralisme en Belgique…). C’est d’ailleurs ce que soulignent Gwenvael Jéquel et Valérie Coussinet, candidat Oui la Bretagne, sur la 8ème circonscription d’Ille-et-Vilaine en critiquant un visuel de la préfecture illustrant une Bretagne amputée de la Loire-Atlantique [illustration de cet article] : « Quand la préfecture communique, on peut dire qu’elle ne fait pas les choses à moitié… Ou plus précisément au 4/5 vue que la Bretagne reste amputée… Inutile de rappeler que les préfets sont nommés par le gouvernement et qu’ils ont la charge, entre autres choses, de l’intérêt national français. Premièrement, un tel visuel suggère que le champ de compétence préfectoral est bien plus large et empiète largement sur celui des collectivités territoriales élus. D’autre part, la Région Bretagne s’efface derrière une Marianne posée comme un sceau et se noie sous une tâche de trois couleurs. Maladresse ? Provocation ? Post-colonialisme ? Certainement un peu de tout cela. À nous de redonner des couleurs à la Bretagne, celles qui nous ressemblent et nous rassemblent, celles que nous auront choisies… Passons-nous des préfets et osons l’émancipation. Passons-nous d’un État central et osons la dévolution ! »

L’expérience au Conseil régional des élus UDB démontre très clairement que le préfet peut facilement passer outre le travail des élus. L’exemple le plus criant s’est exprimé sur la politique de l’eau : pendant que le Conseil régional cherchait à améliorer la qualité des eaux en travaillant en amont avec des agriculteurs, le préfet signait des extensions de porcheries industrielles… Les candidats Oui la Bretagne devront démontrer par A+B la pertinence d’un modèle institutionnel non-centralisé. Ce qui posera inévitablement la question de la place des préfets…

> Ar Skridaozerezh / La Rédaction

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