On pourrait s’interroger sur la mise à disposition d’écoles publiques par les mairies pour des « élections » qui n’élisent pas des représentants politiques, mais désignent des représentants de partis politiques, on pourrait s’interroger aussi sur la généralisation des « primaires » qui réduisent l’importance du premier tour des élections officielles en éliminant un certain nombre de courants politiques, on pourrait s’interroger sur la guerre des égos qui cache une absence manifeste de projets ou sur le fait que des milliers d’électeurs de gauche ont versé 4 € (scrutin censitaire ?) pour élire, lors de la primaire de la droite, le « candidat le moins pire » (avec le résultat que l’on sait). N’en faisons rien et concentrons-nous sur la primaire « citoyenne » qui aura lieu les 22 et 29 janvier prochains.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le Parti Socialiste, qui n’en finit plus de décevoir, a le sens de la communication. Pour commencer, en qualifiant sa primaire de « Belle Alliance Populaire », il semble oublier que le gouvernement en place a contribué à creuser le fossé entre « le peuple » d’un côté et l’« élite » de l’autre. Mais passons… « le peuple » appartient à tout le monde et tout le monde s’en revendique de Mélenchon à Le Pen en passant par Fillon ou Macron. Finalement, prétendre avant même qu’elle ne soit commencée que cette primaire est « populaire » relève de la pensée magique. C’est Manuel Valls qui prétend rassembler alors qu’il a tant divisé, c’est Jean-Marc Ayrault qui se veut l’étendard des droits de l’homme et s’aplatit devant Erdogan ou Xi Jinping, c’est Bernard Cazeneuve qui cite Jaurès sur le perchoir de l’Assemblée Nationale et applique l’état d’urgence… Mais c’est aussi Richard Ferrand qui, d’échanson de la « vraie gauche », devient le lieutenant du libéral Emmanuel Macron.
« La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force », écrivait George Orwell dans 1984. L’inversion des valeurs est en marche et on se demande si les responsables socialistes y croient vraiment eux-mêmes ! La communication réussit la prouesse de faire dire n’importe quoi à n’importe qui : Trotsky vend des ailes de poulet et Marine Le Pen utilise Jaurès pour ses affiches.
Mais ne nous égarons pas et revenons à cette primaire de « la gauche » : le clou de cette communication, c’est sans doute le visuel choisi. Alors que les bonnets rouges ont été conspués jusqu’à Paris, qu’ils symbolisaient l’aliénation au patronat, ceux que certains prétendaient manipulés par la droite et l’extrême-droite, à ceux-là la primaire socialiste leur emprunte le bonnet ! La cerise sur le gâteau ! L’ultime plaisanterie ! Les communicants parisiens ont sûrement compris que ces « ploucs » étaient bien plus « populaires » (du moins en Bretagne) que ne le sont les ministres, mais gageons que les militants socialistes bretons vont goûter moyennement cette blague.
Bonnets blancs et blancs bonnets : après la primaire des Républicains qui a envahi nos postes de télévision ou de radio, une courte page de publicité (Noël) avant de laisser place à la primaire des socialistes ! Vivement que ça se termine…