Une réforme qui ne vaut rien… n’est pas une réforme qui ne coûte rien

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La réforme territoriale n’a pas fini de se mettre en place. Il manque encore quelques 600 millions pour que les régions puissent exercer leurs responsabilités. Un impôt nouveau ? Tout le monde en veut mais personne ne veut en endosser la responsabilité.

Que la dernière réforme territoriale ne vaille rien… nous le savions déjà. À force de mettre de l’eau dans leur vin, les responsables de la haute administration avec l’aide du gouvernement et de quelques élus, sont arrivés à nous pondre une réforme des collectivités à laquelle personne ne comprend rien et qui n’a rien simplifié.

Mais elle devait avoir au moins la vertu de nous permettre de faire des économies. On le disait mais personne ne le croyait puisque les responsables de cette merveilleuse réforme, qui n’a abouti qu’à faire des régions sans identité, n’ont pas osé décider de la suppression du niveau départemental par exemple. Résultat : nous avons toujours autant d’élus mais nous avons rajouté les métropoles et fait des « régions à taille européenne » dont la fusion entraîne des discussions sans fin et va occuper les administrations régionales pour les cinq années à venir. Tout cela sous le regard de l’État central qui, tenu par la gauche ou par la droite, n’a que mépris pour les collectivités territoriales qu’il considère comme des enfants qu’il faut surveiller en permanence.

Après avoir fait semblant de réformer, voilà maintenant qu’il faut tenir les promesses. Certes pas de grandes promesses, mais cependant des petites qui sont difficiles à tenir.

On a donné aux régions la compétence concernant le soutien aux TPE et aux PME. Cette compétence était auparavant celle des départements. Mais – et pour cela l’État central est passé maître – on a oublié de prendre l’argent aux départements pour le donner aux régions. Et bien entendu les départements n’ont pas proposé de faire un chèque aux nouveaux porteurs de cette compétence. Les régions (qui sont passées à droite pour la plupart d’entre elles depuis la réforme) cherchent aujourd’hui 600 millions d’euros pour exercer cette compétence nouvelle.

On a donc imaginé de créer pour cela un impôt nouveau : une Taxe Spéciale d’Équipement Régional qui serait un petit 0,5 à 0,6 % sur la taxe foncière des propriétés bâties et sur la cotisation foncière des entreprises. Donc on avait imaginé une ligne nouvelle d’imposition qui allait toucher particuliers et entreprises.

Un accord avait été annoncé en juin, fruit d’une discussion entre entre le gouvernement et l’Association des Régions de France (désormais tenue par la droite). Mais finalement cela ne se fera pas. Des élus de droite ont senti que ça passerait mal puisque cet impôt serait compris comme un impôt régional alors même que c’est l’État qui devait le collecter et en décider le taux.

Bref, la bonne vieille méthode était à l’œuvre. C’est l’État qui décide, qui ramasse et qui répartit. mais en revanche il fait porter le chapeau aux collectivités en les accusant de dépenser trop.

Mais que ce soit la droite ou la gauche, c’est pareil. Personne n’a jamais voulu remettre en cause le système qui fait que les collectivités sont financées en très grande partie par des dotations de l’État et grâce à des impôts qu’elles ne votent pas. Cela arrange finalement tout le monde.

Quand il manque de l’argent ou quand il faut en trouver, les élus locaux disent que c’est la faute du gouvernement et quand il faut trouver de l’argent pour de nouvelles compétences, l’État fait savoir que les collectivités ne sont vraiment pas responsables et qu’elles dépensent trop.

C’est exactement ce qui vient de se passer avec cette taxe nouvelle qui est morte avant d’avoir vécu. Le premier ministre a décidé de l’abandonner parce que les présidents de régions ne voulaient pas porter le chapeau d’un nouvel impôt. En revanche, ils prendraient bien les 600 millions si on disait au contribuable que c’est le gouvernement de gauche qui a pris la décision. On est en campagne électorale !

De l’autre côté, à gauche, le président de la République ayant promis, juré, qu’il n’y aurait pas d’impôt nouveau on était un peu coincé . Mais ce sont les mêmes qui ont voulu une réforme qui ne devait rien coûter et même générer des économies. Et pourtant, il manque 600 millions à l’appel !

Au registre des souvenirs cette annonce qui avait été faite en 2000 par le premier ministre Lionel Jospin lorsqu’il avait décidé de faire baisser la pression fiscale sur les ménages: il annonçait au 20 heures de TF1 la disparition de la part régionale de la taxe d’habitation et son remplacement par une dotation d’État aux régions. Les régions avaient appris la nouvelle en regardant la télé !

Déjà l’État reprenait la main en enlevant aux régions une part de leurs revenus et… de leur responsabilité. En démocratie, quand on vote l’impôt, on est responsable devant les contribuables électeurs. Mais visiblement plus personne ne veut être responsable de rien. La démocratie va donc mal.

> David Grosclaude

David Grosclaude est ancien conseiller régional en Occitanie. Il s'est illustré notamment comme un élément clef pour l'ouverture de l'Office public de la langue occitane (OPLO) en menant une grève de la faim.