L’Australie s’indigne du traitement à l’égard d’adolescents aborigènes en détention

prison aborigènes

Alors que le festival interceltique de Lorient s’ouvre aujourd’hui avec comme invité d’honneur l’Australie, Le Peuple breton propose à ses lecteurs un petit aperçu des événements récents dans ce pays, notamment en ce qui concerne la communauté aborigène.

Il y a quelques jours avait lieu dans les rues de Melbourne, Sydney ou Brisbane des manifestations visant à dénoncer le traitement honteux perpétrés à l’égard de jeunes prisonniers aborigènes dans un centre de rétention à Darwin. Les faits, révélés par la chaîne ABC, montrent des gardiens brutaliser des adolescents en isolement, voire les torturer du moins pour l’un d’entre eux que l’on voit assis sur une chaise avec une cagoule et une corde le retenant. Blackfulla Revolution, « un média aborigène entre les mains des aborigènes », compare ces scènes au scandale d’Abou Ghraib perpétré par des soldats américains dans une prison irakienne entre 2003 et 2004.

Le Huffington Post rapport que « dans les rues, pourtant, les slogans vont bien au-delà de la seule dénonciation des actes intolérables perpétrés dans le centre Don Dale : aux côtés de « Hands Off Aboriginal Kids » et d’appels au renvoi des politiciens responsables d’incurie manifeste, on pouvait également lire « No pride in genocide » [ndlr : pas de fierté dans le génocide]. » Les manifestants réclament que la commission d’enquête royale s’étende à toutes les prisons et pas seulement au centre de Don Dale afin de dissiper le doute.

Alors que le gouvernement prétendait accorder à ces populations leurs pleins droits dans la société australienne, ce scandale – doublé du fait que le ministre fédéral des affaires aborigènes a admis être informé depuis au moins un an de la situation dans ce centre – fait rejaillir le passé colonial de l’Australie comme le souligne l’anthrolopologue Martin Préaud : « les mauvais traitements infligés aux détenus aborigènes s’inscrivent dans l’histoire longue de cette colonie de peuplement – accaparement de terres, massacres, vols d’enfants, régimes de ségrégation. Ils ont été particulièrement documentés pour les membres des « générations volées », ces milliers d’enfants enlevés à leurs parents aborigènes entre la fin du 19ème siècle et les années 1970 dans le but de les assimiler et d’effacer leur aboriginalité. Le fait qu’aujourd’hui il y ait plus d’enfants aborigènes placés à l’écart de leur communauté qu’aux pires heures de ces politiques d’enlèvement et que les Aborigènes et les Insulaires du détroit de Torres, qui représentent 3 % de la population nationale australienne, constituent près du tiers de la population carcérale et plus de 50 % des délinquants juvéniles placés en détention (97 % dans le Territoire du Nord !), témoigne d’un cadre juridique et institutionnel qui aboutit à une incarcération massive et tout au long de leurs vies des peuples autochtones en Australie ».

La question reste donc posée : l’État autralien est-il resté colonial ? Un petit débat à ce sujet au Festival interceltique de Lorient permettrait peut-être de poser la question du statut des minorités ? En Australie, comme ailleurs…

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]