Extraction de sable. Le groupe Roullier dans le viseur

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C’est sous un ciel bleu que plusieurs dizaines de personnes se sont rassemblées samedi dernier devant le siège du Groupe Roullier à Saint-Malo. La raison ? Protester contre l’extraction de sable au large des côtes bretonnes par une des filiales du groupe, la CAN (Compagnie Armoricaine de Navigation).

Devant le siège du groupe, ce qui est dénoncé en premier lieu, c’est la privatisation d’un bien commun : le sable. Juridiquement, ces bancs de sable appartiennent à la ZEE (Zone économique exclusive) et dépendent donc directement du contrôle de l’État. C’est lui qui peut, par son consentement, permettre l’exploitation de ressources halieutiques sur cette zone. Or, l’État a concédé l’exclusivité des opérations d’extraction de sable à la CAN, depuis que le ministre Emmanuel Macron l’a autorisé en avril 2015. Et pourtant, peu de monde hormis le groupe et le pouvoir à Paris ne souhaitait du projet. Les élus locaux eux-mêmes s’étaient prononcés contre.

La première année, ce sera 50 000 m3 de sable qui pourra être prélevé, ensuite, 100 000 m3, puis 150 000 m3 pendant 3 ans et enfin ce sera 250 000 m3 par an sous certaines conditions. Selon l’offre et la demande du marché, le prix du m3 peut varier entre 10 à 15 euros, l’État, lui, ne prélève comme taxe qu’entre 60 et 70 centimes. Comme le disait ironiquement l’un des intervenants : « on voit bien la volonté de l’État de freiner les appétits de la CAN ! »

Ce sont aussi les enquêtes jugées « bidons » qui sont pointées du doigt par les associations environnementales. Faites par des entreprises d’enquêtes complémentaires au sujet de la dangerosité sur la faune et la flore, on ne peut que rester perplexe lorsqu’on sait qu’elles ont été demandées et payées par l’entreprise Roullier elle-même… Les associations contre le projet préfèrent la légitimité des études indépendantes qui eux dénoncent les dangers environnementaux. C’est l’un des points de friction important des deux parties.

Plus qu’un écosystème en danger, c’est avant tout un pan entier de l’économie du littoral breton qui est menacé. Et en premier lieu, celui de la pêche.

Qui plus est, des solutions existent pour empêcher la disparition prochaine de tout un écosystème marin. Un des exemples est la société Slipper Limpet Processing, basée à Cancale. Cette dernière a trouvé une alternative à l’emploi du sable coquillé : le mollusque crepidula fornicata ou berlingo de mer. Sa coquille solide ferait vraisemblablement une bonne ressource de substitution. Et comme l’indique son nom, cette espèce se reproduit abondamment, à tel point que lorsque les opérations de pompages de ces mollusques se sont arrêtées en 2007, quelques mois ont suffi pour que l’espèce reprenne la place qu’elle avait avant le début des opérations.

Malheureusement, l’opération est jugée bien plus coûteuse que la simple extraction de sable. N’oublions pas que le but pour la CAN et de Roullier est le profit, même si cela doit impacter des écosystèmes… Bref, l’affaire ne s’arrêtera pas là. Les citoyens se mobilisent et se battent toujours pour que cela s’arrêtent et n’hésitent pas à recourir à la justice pour arrêter le pillage.

> Stuart Lesvier

Rédacteur. Historien récemment diplômé de l'université de Rennes 2, médiateur du patrimoine, Stuart Lesvier s'est investi dans divers domaines lors de ses études : en tant que militant à l'UDB Yaouank, dans l'association étudiante Kejadenn ou encore à la SPREV (Sauvegarde du patrimoine religieux en vie). Depuis, il est le fondateur et porte-parole de Rubrikenn Istor Breizh [voir ici], une association créée en 2019 pour promouvoir l'histoire de Bretagne. [Lire ses articles]