Le nucléaire, un caillou dans la chaussure du Plaid Cymru

wylfa_ariel_magnox
La centrale de Wylfa

La France est tellement sujette aux débats sur l’atome qu’on en oublie parfois que le nucléaire est aussi un sujet chez nos voisins britanniques. Si le projet de construction de deux réacteurs nucléaires par EDF à Hinkley Point est d’actualité, il en est un autre qui empoisonne la campagne électorale en cours au Pays-de-Galles et singulièrement le Plaid Cymru : Wylfa Newydd.

L’année dernière, à la même époque, l’Ile d’Anglesey (Ynis Mons) faisait l’objet d’un âpre combat politique entre Albert Owen, député travailliste sortant et John Rowlands, candidat du Plaid qui ne masquait pas ses ambitions. La lutte a été rude et finalement, ce ne sont que 229 voix qui ont permis aux travaillistes de sauver ce siège du nord ouest gallois.

En dernière semaine, il y avait eu un fait de campagne, une polémique bien orchestrée par Albert Owen sur la position ambigüe du Plaid Cymru sur la question nucléaire.

Le nucléaire, une vieille histoire sur Anglesey

La pointe de l’île abrite depuis 1963 une centrale nucléaire. Les deux réacteurs de Wylfa, qui produisaient de l’électricité depuis les années 70, sont arrivés en fin de vie. Le dernier vient d’ailleurs d’être stoppé, en décembre 2015. Mais ce n’est pas cette fin d’activité et les travaux de décontamination qui vont suivre jusqu’en 2026 sous la responsabilité de l’alter égo britannique de l’Autorité de Sureté Nucléaire, la Nuclear Decommissionig Authority (NDA), qui ont alimenté cet ultime débat « à quitte ou double ». Non, le débat a porté sur l’avenir et le projet d’une nouvelle centrale baptisée Wylfa Newydd dont les plans, le design et la technologie sont en cours de réflexion.

Le porteur de projet Horizon Nuclear Power, l’industriel japonais Hitachi allié avec l’ancien gestionnaire de Wylfa, Magnox, peut compter sur le soutien sans faille du gouvernement Cameron mais aussi de l’actuel gouvernement travailliste gallois et du maire de la collectivité locale d’Anglesey. L’opposition est aussi très active et il est probable qu’une enquête publique s’impose, une fois que le projet sera rendu public, normalement en 2017. Les premiers travaux sont attendus pour 2020 avec l’ambition d’une mise en route aux alentours de 2025.

Tu veux ou tu ne veux pas ?

En stigmatisant l’alliance politique entre le Plaid, le SNP et le Parti Vert à l’échelle du Royaume et en rappelant des propos guère sympathiques de Leanne Wood, leader du Plaid, sur la filière du nucléaire civile, Albert Owen avait souligné à quel point une victoire du candidat du Plaid représenterait un danger pour la concrétisation du projet de Wylfa Newydd, sous-entendu pour l’emploi local et la sécurité de l’approvisionnement énergétique.

Or, Rhun ap Iorwerth, leader du Plaid sur Anglesey, a rétorqué que lui et John Rowlands, le candidat à la députation, avaient constamment défendu les bénéfices économiques de ce nouveau projet nucléaire, notamment pour l’emploi des jeunes de l’île.

Le Plaid marche sur des œufs

Un an après cet épisode fortement médiatisé, le sujet est toujours sur la table. Selon l’aveu même de Leanne Wood, le nucléaire demeure une difficulté pour le Plaid. Le sujet est difficile à cause des emplois qui dépendent de la filière. Récemment, à la BBC, Leanne Wood a rappelé l’opposition très claire du Plaid sur le nucléaire militaire avant de déplorer, qu’en termes d’emplois, la Nation ait mis « tous ses œufs dans le même panier nucléaire » avec 6 000 emplois travaillant au pic de son activité à la centrale électrique de Wylfa.

Elle a ajouté que si l’actuel projet de remplacement de Wylfa échouait, il fallait trouver une alternative pour l’emploi. Pour Mme Wood, celle-ci est évidente. Non sans avoir rappelé son avis personnel sur la question du nucléaire civile et le fait que jusqu’ici aucune diversification sérieuse n’avait été possible, elle a insisté sur le fait qu’une solution autour des énergies renouvelables avait la faveur du Plaid qui, dans son Manifesto, ambitionne de recourir au maximum du potentiel local pour assurer, d’ici 2035, (en moins de 20 ans) les besoins électriques des gallois.

Bref, si les œufs de la politique énergétique britannique sont dans le même panier nucléaire, il faut bien reconnaître que, de son côté, le Plaid marche sur des œufs sur cette même question nucléaire, en naviguant entre opportunisme et véritable vision pour l’avenir de la nation galloise.

> Christophe Kergosien

Christophe Kergosien est un ancien journaliste. Il s'intéresse aux questions énergétiques, mais aussi de démocratie locale.