
Cela devient une habitude : après chaque élection où le FN monte (de plus en plus), on accuse les abstentionnistes ! À première vue, cʼest légitime : aucun droit nʼest un acquis éternel et chacun dʼentre eux, y compris le droit de vote, est un combat de chaque jour. Pour les femmes bien sûr qui savent que le droit de vote leur est permis depuis 1945 seulement, mais aussi pour les hommes. Ne pas voter délégitime lʼélection. Pour autant, sont-ce les abstentionnistes qui délégitiment la politique ? Rien nʼest moins sûr…
Premièrement, on part du principe quʼun abstentionniste ne serait pas tenté par le FN au motif que les électeurs du FN se mobilisent plus lors des élections. Pourtant, dʼaprès une récente étude Ipsos, le taux dʼabstention chez les inscrits qui se disent proches du FN atteint 44 % quand il est de 45 % pour ceux qui se disent proches du PS. On peut donc reprocher aux abstentionnistes de laisser la responsabilité à dʼautres, mais la montée du FN ne sʼexplique pas par lʼabstention. Pire, on sʼaperçoit que Marine Le Pen ou Marion-Maréchal Le Pen, devenues de véritables « star-système », glanent des voix habituellement abstentionnistes du fait dʼun discours moins technocratique que les autres partis.
Comme après chaque élection, nombreux sont les observateurs à expliquer que le FN nʼengrange pas plus de voix quʼaux élections précédentes et cʼest souvent juste. Mais outre le fait de se rassurer, cela change-t-il quelque chose au fait que les autres partis sʼeffondrent ?
Et de ce point de vue, les abstentionnistes nʼont pas à brader leur espérance sur lʼautel du « réalisme » politique qui cache de plus en plus mal la non-ambition de certains élus. Il appartient aux partis politiques de comprendre lʼabstention et dʼy faire face en proposant un réel horizon, un projet fédérateur et non des objectifs dont on sait non seulement quʼils ne seront pas tenus, mais qui plus est, quʼils sont incompréhensibles (ex : la France s’est dotée d’un objectif d’une division par quatre de ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. Pourquoi par 4 ? Pourquoi 2050 ?). Face à cette technocratie, le FN nʼoffre quʼun bien piètre espoir, un rêve pour ceux qui nʼont aucune imagination, mais il donne une solution sécuritaire à ceux qui estiment quʼil faut « remettre de lʼordre ».
Il est temps de prendre conscience que lʼabstention, à défaut dʼune réelle reconnaissance du vote blanc, est un indice de la vitalité démocratique. Dʼoù mon opposition farouche au vote obligatoire qui casserait le thermomètre sans pour autant régler la cause du problème : lʼespoir ou plutôt le manque dʼespoir. La responsabilité du non-vote incombe aux partis qui sont incapables de ramener aux urnes des citoyens désabusés et refusant de voter par défaut.
On sʼy met quand ?