La notion de richesse a été confisquée depuis plusieurs décennies par l’idéologie ultralibérale. Preuve en est que lorsqu’il s’agit de ce sujet, les politiques, les médias nous renvoient en permanence à la notion de croissance. Mais de quelle croissance parle-t-on ? Il s’agit ici de la croissance du PIB – Produit Intérieur Brut. Pour simplifier, le PIB est égal à l’addition de l’investissement, de la consommation, de la balance commerciale et de la balance monétaire d’un territoire donné, sur une période donnée (en général un an). Et si on fait l’amalgame (comme le fait la classe politique de l’extrême droite à la gauche libérale) entre les notions de PIB et de richesse, on arrive bien évidemment à la conclusion que la richesse consiste uniquement en une somme de production/consommation dans le cadre d’échanges marchands monétarisés.
Sur ces bases, il est aisé de comprendre pourquoi les idéologues libéraux voudraient réduire la richesse ou la prospérité à la notion de PIB : cela les aide dans leurs objectifs. En effet, comment mieux prétendre augmenter la prospérité d’un pays dans ce cadre, si ce n’est en augmentant la « surface » des services marchands ? Et comment mieux augmenter cette surface, cette assiette de services marchands qu’en rendant marchands des services actuellement non-marchands, c’est-à-dire en privatisant des services publiques (les écoles, les hôpitaux) voire des ressources naturelles (l’eau via des « Délégations de Service Public », mais aussi la flore comme le fait Monsanto) ? Comment mieux combattre l’idéal écologiste qu’en refusant de sanctuariser les ressources naturelles et immatérielles communes (l’air que nous respirons, la biodiversité, les langues ou les cultures locale) ? Comment mieux brider les initiatives bénévoles ou solidaires sur le terrain qu’en enfermant le monde associatif et la population en général dans un magma juridique inextricable et culpabilisant ? Le PIB a son utilité, pour comptabiliser la production d’un pays dans le cadre d’échanges marchands, mais c’est tout. La véritable prospérité, c’est autre chose.
Alors comment faire des propositions qui permettent de mettre la Bretagne sur la voie de la prospérité véritable, non pas contre le PIB (car dans une économie capitaliste monétarisée comme celle dans laquelle nous évoluons actuellement) mais au-delà du PIB ? On connait la rengaine ultralibérale qui est ressassée, souvent inconsciemment, par les médias, et qui voudrait, sur les bases précédemment décrites, que nous assénions ici quelques contre-vérités sur la nécessaire « baisse des charges » pour assurer la « compétitivité », l’urgente « libération des énergies » et notre supposée entêtement à l’endettement pour « vivre au dessus de nos moyens » dans « une mondialisation heureuse » dont nous aurions, étrangement, peur. Les tenants de la pensée économique « mainstream » se gardant bien ici de préciser ce qu’on entend par mondialisation ici : la mondialisation financière libérale tenant lieu de synonyme « d’ouverture sur le monde ».
Nous ne tomberons pas dans ce piège du soi-disant « repli sur soi » de ceux qui refusent les potions libérales. Les Bretons ont parcouru la planète à travers les âges et peuvent se revendiquer pionnier de l’ouverture sur le monde et des échanges commerciaux internationaux, s’appuyant à cette magnifique façade maritime. Ce qui faisait la force du commerce bretons c’était la qualité et la spécificité des produits exportés à travers les mers et les océans, des fraises de Plougastel aux toiles des marins d’Outre-mer vitréens. Il nous faut aujourd’hui retrouver ces valeurs. Retournons-nous vers la valeur ajoutée, la production de qualité, l’authenticité surtout …. Re-tournons-nous vers la mer !
La compétitivité est également une notion dont les facettes multiples sont éludées pour s’en tenir à la compétitivité-prix, dont la seule prise en compte conduit inexorablement à la baisse des normes sociales et environnementales. Nous lui préférerons la compétitivité qualité qui pousse vers l’excellence, vers l’innovation, l’invention, la durabilité. Le haut niveau de compétence, de fidélité et d’abnégation des bretons sont nos meilleurs atouts pour attirer les entreprises, au delà de la qualité de vie et de la force de notre culture.
Enfin contrairement à ce qu’indique aussi la doxa ultralibérale, la richesse (financière) n’est pas à l’origine de la solidarité : les sociétés et les individus les plus pauvres sont souvent les plus solidaires. Toujours à rebours de ce qu’affirme les libéraux de tout poil, la compétition à tous les étages, sans règle ni morale, n’est pas source d’innovation, de progrès, de création de richesse et d’optimisation de la production. D’ailleurs, de plus en plus d’études scientifiques et économiques démontrent que c’est au contraire la coopération qui constitue le meilleur pilier d’un développement économique soutenable et durable. Et enfin, pour la contredire une dernière fois, ce n’est pas l’endettement qui mine nos sociétés, c’est le chômage. Le chômage bride l’initiative individuelle, plombe les comptes publics, réduit la consommation, empêche les revalorisations salariales, génère de la frustration dans la société et exclu socialement des millions de gens.
La prospérité réelle d’une société quelle qu’elle soit s’appuie sur de multiples piliers :
- un haut niveau « d’intelligence » (éducation, culture, démocratie)
- la capacité à produire évidemment en s’appuyant sur les compétences mais aussi sur des infrastructures de qualité
- l’intégration sociale notamment par le travail pour tous et la lutte contre l’exclusion
- l’égalité de droits et l’équité matériellement parlant, la solidarité et le lien social pour affronter les aléas
- un haut niveau de mobilisation du capital au service de l’économie (dite « réelle » – il existerait donc une économie virtuelle ? mais pour quoi ? Pour qui ?)
- et enfin un haut degré d’autonomie : énergétique, politique et financière par exemple
On voit tout de suite que la Bretagne a toutes les cartes en main pour réussir mais…
Mais ses talents et ses élites quittent le territoire en masse pour trouver du travail une fois formés ;
Mais la Bretagne ne produit que peu de valeur ajoutée malgré la reconnaissance dont joui les compétences et le savoir-faire des bretons ;
Mais le chômage qui progresse fortement risque de miner la solidarité naturelle des bretons ;
Mais la rupture des équilibres territoriaux historiques qui ont structuré la société bretonne, commence à diviser les bretons ;
Mais l’épargne des bretons est dissipée et dispersée de manière inefficace et improductive ;
Mais les décisions qui concernent les bretons dans le domaine politique ou entrepreneuriale sont prisent ailleurs et l’énergie bretonne est importée (en plus d’être polluante ou nucléaire).
Le projet de la liste « Oui, la Bretagne » consiste à faire réussir la Bretagne en effaçant, un à un, tous ces « Mais » qui nous empêchent de nous épanouir.
Nous voulons aider les entreprises bretonnes à se financer localement, pour décider ici en Bretagne et pour qu’elle puisse sans crainte se tourner vers l’innovation et un développement économiquement et socialement durable. Pour que le chômage baisse en Bretagne. Pour que les jeunes bretons puissent travailler et vivre au Pays. Pour favoriser les modèles coopératifs et mettre en œuvre, ici, une économie de marché qui ne soit pas une jungle. Pour que l’équilibre territorial qui fait historiquement notre force ne soit pas rompu.