Deux récents sondages indiquent que les listes autonomistes en Région Bretagne et Pays-de-la-Loire pourraient atteindre respectivement 8-9 % et 4 % des suffrages au premier tour des élections régionales. Si ces résultats se concrétisent, il s’agirait dʼune première en Bretagne où les formations bretonnes nʼont jusquʼà lors jamais dépassé les 4 % en Région Bretagne et les 1 % en Région Pays-de-la-Loire.
Avant toute chose et pour éviter que ces sondages ne sʼancrent dans les esprits comme une réalité, il convient de rappeler que les enquêtes dʼopinion, bien que basées sur une méthode scientifique ne sont pas pour autant une science exacte. Les deux récents sondages réalisés successivement par lʼIFOP et BVA sur les élections régionales restent donc des indicateurs quʼil faut regarder avec méfiance. Trop de médias ont en effet tendance à présenter les sondages comme de mini-référendums en faisant que « ce quʼexpriment les sondés » devient « ce que pensent les Français ». Notons également que les sondages prévoient tous une marge dʼerreur de quelques pourcents, or, un ou deux points de plus ou de moins que ce qui était prévu peut tout changer, en bon comme en mal. Ces précautions dʼusages doivent être soulignées, -et il faut y ajouter quʼil reste plusieurs semaines de campagne avant le jour du vote – pour doivent permettre dʼéviter que les prédictions ne deviennent dans les esprits des réalités pouvant conduire à quelques surprises le soir de lʼélection.
Une élection, deux régions administratives.
Les listes autonomistes, en Bretagne, se présentent sur deux régions en raison du cinquième département breton, la Loire-Atlantique qui fait partie administrativement des Pays de la Loire. Cette situation ubuesque, source de débats et que la réforme territoriale et le récent redécoupage des régions nʼa pas changé, conduit à cette particularité dont les autonomistes se passeraient bien. Deux listes seront donc en lice avec celle de « Oui la Bretagne » en Région Bretagne et celle nommée « Choisir nos régions » en Pays de la Loire. La première est menée par Christian Troadec, et lʼUDB tandis que la deuxième est conduite par Gilles Denigot et est soutenue par lʼensemble des formations bretonnes, à lʼexception, bien-sûr, de lʼextrême-droite. Ces deux listes, bien que toutes deux autonomistes ne sont pas liées lʼune à lʼautre. En Région Bretagne, la possibilité de siéger dans une institution bretonne rend en effet le clivage gauche-droite nécessaire pour dégager des orientations qui dépassent lʼautonomie régionale tandis quʼen Loire-Atlantique la question de la réunification de la Bretagne constitue le dénominateur commun des formations bretonnes pour ces élections.
« Oui la Bretagne » au seuil du second tour.
La liste autonomiste menée par Christian Troadec, le très médiatique maire de Carhaix, et lʼUnion démocratique bretonne (UDB), est créditée par un sondage de lʼIFOP de 8 % dʼintentions de vote tandis que celui de BVA la situe à 9 %. Si ce résultat se confirme, la poussée serait importante. Aux dernières élections régionales, en 2010, Christian Troadec réalisait en effet 4,29 % des suffrages soit moitié moins que les prévisions pour 2015. Cette poussée peut sʼexpliquer par plusieurs facteurs, le premier étant la personnalité du candidat, connu et largement médiatisé pendant toute la période des « Bonnets Rouges ». Incarnant la volonté de « vivre, décider et travailler au pays », la défense de lʼemploi et le rapport de force vis-à-vis du pouvoir central pour une « véritable régionalisation », Christian Troadec séduit. La liste « Oui la Bretagne », située entre le centre-gauche et la gauche, dotée dʼune tête de liste médiatique et disposant des forces militantes de lʼUDB semble donc être à lʼorée du second tour. Rappelons en effet que, en lʼabsence de proportionnelle, seules les listes atteignant 10 % peuvent se présenter au second tour empêchant de fait toutes les formations réalisant jusquʼà 9,99 % et leurs électeurs dʼêtre représentées dans lʼassemblée régionale. Un scandale démocratique avec lequel la liste « Oui la Bretagne » (et bien dʼautres) devra composer. A moins de deux mois des élections, les autonomistes sont donc, selon les sondages, à la limite de bousculer l’échiquier politique du second tour.
« Choisir nos régions », le poil à gratter des élections régionales en Pays-de-la-Loire.
Véritable surprise du côté des Pays-de-la-Loire, la liste « Choisir nos régions », soutenue par lʼUnion démocratique bretonne, Breizhistance, le Mouvement Bretagne Progrès et le Parti Breton, est créditée par le sondage BVA de 4 % dʼintention de vote. L’initiative lancée par une « coopérative politique » réunissant ces formations et des personnes non-encartées serait alors le « poil à gratter » de la campagne que souhaitait Gilles Denigot, chef de file de « Choisir nos régions ». Cette liste porte principalement la volonté dʼun redécoupage des régions permettant aux citoyens des Pays-de-la-Loire de décider de leur région dʼappartenance et sʼinscrit dans une stratégie assumée de lobby à lʼoccasion de ces élections. Avec 4 % dʼintention de vote, selon les sondages, cʼest une véritable surprise car, lors des précédentes élections, les listes portant principalement la revendication dʼun redécoupage des régions réalisaient des « scores » bien moindres. Ainsi, à l’occasion des élections régionales de 1998, lʼUDB réalisait 0,84 %, en 2004 il nʼy avait aucune liste « régionaliste » et en 2010, le Parti Breton réunissait 0,99 % sur lʼensemble de la région. La percée des autonomistes que rapporte le sondage de BVA serait donc impressionnante, dʼautant que les résultats sont à lʼéchelle de la région alors que le territoire dʼaction de cette liste est principalement la Loire-Atlantique. Si les prévisions du sondage se confirment, la liste « Choisir nos régions » dépasserait donc les 5 % dans le cinquième département breton, ce qui serait une première. Si la prudence est de mise quant aux sondages, comme rappelé au début de cet article, une telle percée autonomiste pourrait être attribuée au débat sur le redécoupage des régions qui a été marqué par dʼimportantes mobilisations pour lʼintégration de la Loire-Atlantique à la Bretagne tout au long de lʼannée 2014. Le fait que la liste soit portée par Gilles Denigot, ancien docker et ancien élu municipal et départemental et que « Choisir nos régions » se distingue au milieu des formations politiques traditionnelles peut également constituer des facteurs jouant en faveur de cette liste.