Présidentialisme hier et aujourd’hui

présidents de la république

C’est sous la Seconde République, avec la constitution de 1848, que le pouvoir exécutif est confié par le vote à un seul homme, le président de la République, élu au suffrage universel direct et rééligible. Il est intéressant de comprendre le contexte dans lequel il a été décidé que la République française doit être composée d’un président de la République élu par le peuple, puisque c’est ce modèle qui a perduré pour toutes les Républiques qui ont suivies, y compris la Vème.

Cette nouveauté institutionnelle, est le fruit de débats qu’il est intéressant de remettre en perspective avec les questions de la répartition des pouvoirs, et des missions d’un président, afin de mieux les comprendre. En 2014, le Sénat a notamment refusé d’adopter la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat présidentiel et à le rendre non renouvelable.

 

Les débats menés en 1848, à l’Assemblée constituante du gouvernement provisoire de la IIème République, suite à l’abdication de Louis-Philippe et à la fin de la Monarchie de Juillet, avaient pour objectif de rédiger une nouvelle constitution. Certains orateurs se sont démarqués par leur éloquence et leur art de convaincre : notamment Tocqueville et surtout Lamartine, dont le discours fut décisif.

 

Un aspect des débats a porté sur la réélection ou non suite à la fin du mandat présidentiel. D’un côté il y avait la crainte que le président use de son pouvoir en vue d’un but unique, se faire réélire, et non pas gouverner les affaires du pays. Mais, Tocqueville défendait un autre point de vue : « si le Président n’est pas rééligible, on peut jeter un énorme mécontentement dans l’esprit d’un homme éminent qui ne peut prolonger son pouvoir et accomplir les grands desseins qu’il médite, on ne lui laisse que l’ambition du désespoir et on lui inspire l’idée de briser la Constitution ». C’est cette dernière opinion qui a été validée, le président de la République était donc rééligible.

Concernant les pouvoirs conférés à un président de la République, à cette époque deux écueils voulaient être évités. D’une part, en réminiscence de la période de la Convention (la Terreur), les députés voulaient éviter que le chef de l’exécutif soit à la merci de l’Assemblée ; et au contraire, il était nécessaire d’éviter qu’il dispose de pouvoirs trop grands et puisse donc aller vers l’abus de pouvoir. Lamartine défendait l’idée que le président devait être élu par le suffrage direct, par le peuple, dans la perspective de lui donner une légitimité républicaine.

La création du rôle de président de la République n’allait pas de soi. Ainsi, Jules Grévy, député républicain, défendait un amendement supprimant la présidence de la République : le chef de l’exécutif aurait été le président du Conseil des ministres, élu par l’Assemblée, qui pourrait toujours le révoquer.

C’est également à cette époque que le traitement du président a été discuté pour la première fois : il a été décidé que le président devait être moteur d’encouragement économique et donc percevoir un haut revenu. Même si certains députés défendaient l’idée d’un président exemple d’une vie modeste.

La suite des événements et l’arrivée au pouvoir de Louis Napoléon Bonaparte (devenu ensuite Napoléon III) ont incité les fondateurs de la IIIème et de la IVème République à donner un pouvoir prépondérant au Parlement. Cette logique ne fut remise en cause qu’en 1962.

Aujourd’hui, envisager un gouvernement composé d’assemblées ou de commissions uniquement pourrait être perçu comme un risque d’éclatement, pourtant, dans un autre contexte, plus avant dans l’histoire, ce qui paraissait dangereux, et qui faisait débat, c’était au contraire de donner un pouvoir à une seule personne, avec la crainte du césarisme et de l’abus de pouvoir, voire les réminiscence de la monarchie et du pouvoir dynastique.

Certains débats politiques sont récurrents dans le temps et c’est la raison pour laquelle l’histoire est une discipline importante pour forger son opinion et déjouer les effets de mode, qui tentent de créer une nouveauté tout en reformulant des débats ancestraux.

 

Pour aller plus loin :

Michel Winock, 2001. Le président de la République, L’Histoire, n°258, page 32 http://www.histoire.presse.fr/dossiers/le-president-de-la-republique/un-bonaparte-a-l-elysee-01-10-2001-6422

 

> Marion LECONTE

Nantaise, Marion Leconte a fait un double cursus de breton et de géographie. Puis elle a choisi de poursuivre ses études en géographie afin de pouvoir voyager hors Europe et notamment en Inde du sud. Elle se prépare actuellement au métier de l’enseignement dans le secondaire.