Rémi Lefebvre : « Dépolitisation et standardisation de l’action des collectivités »

Lefebvre

Dans un article de la Gazette des communes daté du 5 octobre dernier, Rémi Lefebvre, politologue et élu socialiste de la commune d’Hellemes près de Lille, livre une analyse tout à fait intéressante du Parti socialiste (même si cette analyse vaut également pour d’autres partis). En réalité, ce n’est pas tant le fonctionnement de ce parti qui compte dans son propos, mais bien le fonctionnement de la démocratie française. « Avec l’intercommunalité, la multiplication des satellites des collectivités (Offices HLM, sociétés d’économie mixte, associations subventionnées…) et des possibilités de montages des dossiers, l’action publique locale est devenue très complexe, pour ne pas dire baroque. C’est, en tout cas, une affaire de spécialistes. Dans ces conditions, les collaborateurs de cabinet et les cadres territoriaux reconvertissent leur savoir-faire en éligibilité », explique pour commencer Rémi Lefebvre.

Ces « technotables » (terme inventé par Jean-Pierre Gaudin) parmi lesquels il cite au passage Johanna Rolland, maire de Nantes, et Nathalie Appéré, maire de Rennes, ont beau avoir des qualités, il n’en reste pas moins que, selon lui, « ils sont moins politisés que leurs prédécesseurs. Ils ne défendent plus de doctrine particulière. Ils sont désignés en fonction de leur compétence, non de leur représentativité parmi la population. Ils favorisent, ainsi, la montée de l’abstention aux élections locales ». Qui plus est, Rémi Lefebvre estime qu’ils « développent une conception, avant tout, managériale. Ils participent à la dépolitisation et à la standardisation de l’action des collectivités » avant d’argumenter en disant que « les collectivités font toutes la même chose ». Tant en matière d’urbanisme, d’aménagement commercial que de « démocratie participative » (…), on ne peut pas lui donner tort ! Cependant, il aurait pu rajouter que cette dépolitisation est due également à la centralisation et au fait que les collectivités, au même titre que les « régions », ne sont pas considérées comme « adultes » et que la décentralisation est bien plus de gestion que réellement politique.

Rémi Lefebvre livre aussi une critique dure contre les partis politiques en général qui, pour la plupart et du fait de l’accélération du calendrier, sont de plus en plus concentrés sur l’échéance électorale et non plus le projet. Selon lui, « les logiques d’institution prennent le pas sur les logiques de parti ». Conséquence : « quand une ville est perdue, le parti perd entre un tiers et la moitié de ses adhérents ». Selon ce spécialiste du PS, malgré un bon bilan, des maires peuvent désormais tomber. « Ils [les maires] n’ont pas saisi que les gens sont moins attachés à leur maire, y compris dans les petites villes. La nationalisation des élections locales balaie tout sur son passage. Les départementales de 2015 ont confirmé la tendance. Les régionales de décembre 2015 le démontreront encore : plus personne, ou presque, ne résiste à ces grandes vagues nationales ».

Là encore, difficile de donner tort à Rémi Lefebvre tant on sait que la centralisation médiatique et politique nationalise les scrutins. D’où également les traditionnels faibles scores des autonomistes… obligés de se faire entendre à Paris pour peser sur le scrutin chez eux !

> Ar Skridaozerezh / La Rédaction

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