
Lʼordolibéralisme auquel Le Monde diplomatique daté du mois dʼaoût à venir consacre un long article est la « doctrine » économique quasi-officielle des institutions européennes dʼaujourdʼhui. HansTietmeyer en est un des inspirateurs et des représentants les plus indiscutés, et le promoteur de la version de lʼéconomie sociale de marché qui prospère dans les mêmes sphères politico-financières et au-delà.
M. Tietmeyer a présidé naguère un cercle de réflexion : lʼInitiative pour une nouvelle économie sociale de marché, qui lutte notamment contre le soutien public aux énergies renouvelables, contre lʼimpôt sur le patrimoine et contre le salaire minimum légal.
On voit tout de suite que, pour ce courant de pensée, la concurrence « non faussée » est une préoccupation plus impérative que le progrès social et que, sʼil y a des barrières protectrices à faire tomber, ce ne sont pas celles qui favorisent la croissance durable des grandes fortunes.
M. Tietmeyer déclarait dʼailleurs au Monde, en septembre 1993 : « Lʼenjeu, aujourdʼhui, cʼest de créer les conditions favorables à une croissance durable et à la confiance des investisseurs. Il faut donc contrôler les budgets publics, baisser le niveau des taxes et impôts jusquʼà leur donner un niveau supportable à long terme, réformer les systèmes de protection sociale. » Suivent des critiques des systèmes de protection sociale et des « rigidités du marché du travail ». Pour lʼéconomiste allemand : « Une nouvelle phase de croissance ne sera atteinte à nouveau que si nous faisons un effort de flexibilité sur le marché du travail ».
Le sociologue Pierre Bourdieu, qui commentait le 25 octobre de la même année dans Libération les propos de M. Tietmeyer publiés par Le Monde, souligne lʼhabileté rhétorique du « nous », qui évite à Tietmeyer de dire honnêtement : « Courage, travailleurs, tous ensemble, faisons lʼeffort de flexibilité qui vous est demandé ».
Voici quelques lumières sur la pensée de ceux qui gouvernent aujourdʼhui lʼEurope.