En visite à Berlin, Youenn Le Lay, un camarade brestois de lʼUDB, nous a envoyé ce commentaire : « À Berlin, depuis mercredi dernier, on mesure le déchaînement quasi-général des médias et des journaux les plus écoutés et les plus lus contre Syriza et Alexis Tsipras, le Premier ministre grec… en parfaite harmonie avec les chefs de file des deux partis de la grande coalition, Angela Merkel de la CDU et Sigma Gabriel du SPD ». Ambiance à quelques jours du référendum surprise proposé par le Premier ministre au peuple grec.
Dimanche dernier, le « non » au plan dʼaustérité lʼa emporté à 61 % des votants. Ce référendum précipité a certes vu la popularité européenne du Ministres des Finances démissionnaire Yanis Varoufakis augmenter sensiblement chez tous les militants de gauche, il a surtout redonné un espoir à ceux qui nʼont pas oublié que lʼUnion européenne doit protéger et non précariser. Nʼen déplaisent aux nombreux chroniqueurs qui, en plus de leurs commentaires insipides, tiennent des propos racistes du genre « les Grecs sont dispendieux » ou « les méditerranéens sont ainsi » ou « les Grecs sont irresponsables », cʼest bien un débat de fond qui a lieu en ce moment à lʼinstar du référendum de 2005 sur le traité constitutionnel. Aujourdʼhui, la sociale-démocratie, convertie au libéralisme dur, fait face à une gauche (très affaiblie) qui refuse de suivre les directives du FMI à la lettre sans pour autant refuser la construction européenne. Rêver nʼest plus permis désormais.
Comment donc sortir la Grèce de la crise avec des propositions de gauche ? Posons le constat : la dette grecque était de 355 milliards dʼeuros fin 2011 et de 317 milliards dʼeuros à la fin de 2014. Autrement dit, tous les efforts consentis, toutes les privations du peuple grec ont permis de réduire la dette, exploit en soi que la France et lʼAllemagne seraient bien incapables dʼaccomplir. Ensuite, posons-nous la question : dʼoù viennent les problèmes grecs ? Dʼoù si ce nʼest dʼune ingérence intolérable dʼun organisme financier qui nʼa comme « solution » que la précarisation ? Dʼoù si ce nʼest de lʼabsence dʼun salaire minimum, absence qui oblige les populations à frauder pour vivre plus décemment ? Et qui bénéficie de ces mesures de précarité ? Le peuple grec ?
Loin de nous lʼidée de faire de Varoufakis et de Tsipras des héros de la révolution, mais ils tiennent tête à un cartel de banquiers et cela change des carpettes politiques de ces dernières années qui sʼécrasent devant le moindre patron de multinationale qui menace de délocaliser. Le FMI, de son côté, nʼa jamais préconisé de mesures sociales à qui que ce soit, mais il est, apparemment, lʼalpha et lʼomega de la réussite économique ! Pourtant, si les Grecs (mais on peut aussi parler des Italiens par exemple) pouvaient vivre de leur travail, ils paieraient leurs impôts et amélioreraient sensiblement la dette publique grecque en renflouant les caisses de lʼÉtat. Cʼest donc dʼabord à cela que lʼUnion européenne devrait travailler. On notera dʼailleurs le silence assourdissant contre lʼoligarchie grecque qui place son argent en Suisse plutôt que de payer les impôts quʼelle doit à lʼÉtat. La dette, cʼest pour les pauvres.
Il est donc primordial dʼimposer à tous les États de lʼUnion européenne des conditions sociales minimums à commencer par un salaire minimum pour cesser de tirer lʼéconomie européenne vers le bas.
Deuxième préconisation : sʼémanciper des banques privées en recréant au moins une banque publique qui pourrait prêter de lʼargent sans intérêt au gouvernement pour assurer la transition vers une situation plus saine ! La Grèce ne peut pas se tirer de ce guépier tant quʼelle est acculée par les intérêts de la dette. Et cette réflexion vaut pour tous les États européens, la France en tête. Rappelons-nous toujours que la dette publique est rentable… pour les banques.
Les dirigeants européens, libéraux, ne souhaitent surtout pas que le système bancaire retombe sous la coupe du public. Ils savent aussi pertinemment quʼun « Grexit » affaiblirait lʼUnion européenne, y compris marchande, car elle montrerait la voie à ceux des ultra-nationalistes qui souhaitent en sortir comme UKIP, le FN et tout un tas de groupuscules xénophobes. En revanche, tout faire pour que Tsipras se prenne les pieds dans le tapis et perde sa majorité permettrait aux libéraux de se débarrasser dʼun adversaire encombrant. Lʼingérence politique a toujours été une arme des libéraux.
Concluons par les mots de notre camarade en visite en Allemagne : « depuis le référendum en Grèce, cʼest à qui versera les plus grosses larmes de crocodiles sur le sort du peuple grec ! Dans lʼédition de samedi dernier du Spiegel, on pouvait lire un long article plein de compassion pour tous les très nombreux retraités allemands qui ont choisi de vivre leur retraite en Grèce. A noter dʼailleurs quʼAngela Merkel aussi adorait passer des vacances en Grèce. » La réalité est cynique : des États pauvres au sein même de lʼUnion européenne, cela sert aussi les libéraux. Le système que ces derniers préconisent entérine en effet les disparités et ne cherche pas à les résorber. La Grèce, cʼest moins loin que lʼInde pour qui nʼa pas les moyens de vivre avec sa retraite dans son propre pays ! Problème : où vivront les Grecs ?