Philippe Noguès, lors de la fête de la Rose, en 2012
La semaine dernière Philippe Noguès, député du Morbihan et « frondeur » du Parti Socialiste, a choisi d’être en phase avec ses positions en quittant ce parti. C’est donc un autre épisode de la lutte interne au PS entre les légitimistes qui défendent coûte que coûte le gouvernement et les contestataires qui remettent en question son orientation libérale. Cette décision du député a au moins le mérite de la clarté politique. Il prend également un risque non négligeable de perdre sa circonscription puisqu’il y a fort est à parier que les instances socialistes locales tireront sur lui à boulet rouge.
Cependant, contrairement à ce que laisserait penser les réseaux sociaux, ce serait un grand raccourci que de classer M. Nogues dans le camp de la gauche progressiste. Sa défense des valeurs de gauche est bien plus en lien avec la vision qu’en ont des gens comme Jean-Luc Mélenchon ou Jean-Pierre Chevènement soit un État central fort seul garant de la solidarité nationale.
Lors de l’épisode des bonnets rouges, il a réduit ce mouvement à cette simple phrase : « Allons-nous continuer à donner l’image d’une Bretagne archaïque, violente, repliée sur elle-même ? » Il accuse même dans un autre texte l’institut de Locarn d’être derrière ces partisans de l’affaiblissement de l’État. Argument éculé qui montre soit une méconnaissance du sujet soit une volonté de manipulation. Pour lui, seul un État fort est capable d’assurer une péréquation et une solidarité nationale. Il semble oublier la concentration des richesses et des pouvoirs que la France connait depuis longtemps. Il existerait une solidarité de Paris envers les régions ? Comment peut-on réellement croire cela ? Une vraie péréquation n’est possible que dans un État fédéral et tous les pays occidentaux nous le montrent, mais cela semble inconcevable pour lui. Or, il faut continuer de marteler que le centralisme français est en premier lieu l’expression d’un nationalisme et non l’aboutissement d’une idéologie de gauche.
N’oublions pas non plus que M. Noguès fut un des députés bretons à défendre la fusion de la Bretagne avec les Pays de La Loire pour créer une région « Grand Ouest ». Il aime la Bretagne et son identité bien évidemment, mais invite les bretons à ne pas donner l’impression d’un repli sur soi. Et puis, comme le dit Bernard Poignant qu’il cite : « les Vendéens sont restés Vendéens, même dans les Pays de Loire », il doit en être de même pour les Bretons dans un Grand Ouest, non ? Encore une fois, il y a la négation du peuple breton. La volonté de partager un avenir commun au sein d’un territoire ne se décrète pas, elle se construit. La Bretagne a la chance d’avoir cette cohésion qui est à la base de son dynamisme. Mais pourquoi y voir une attaque envers l’État ? À moins que la lecture des choses soit bien plus basée sur le nationalisme ?
Oui, M. Noguès quitte un parti dont on a du mal à le classer encore à gauche, mais sa vision de la France n’en fait pas un réformateur pour autant. La gauche ne pourra se réformer tant qu’elle s’arc-boutera sur une vision passéiste de l’État construite au XIXème siècle. Et force est de constater qu’au niveau national, rare sont ceux qui défendent un autre modèle.