Disparition dʼune « certaine idée de la France »

SAC

Charles Pasqua est mort. Celui que la presse présente comme gaulliste et résistant aura, durant sa longue carrière politique, fait couler beaucoup dʼencre. Sa disparition en fait couler aussi et gomme les passages obscurs pour se concentrer sur lʼ« Homme dʼÉtat ». Petit rappel pour les plus jeunes…

« Charles Pasqua était un grand gaulliste, qui était dʼabord résistant et qui avait une certaine idée de la France » a twitté Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du parti socialiste. On retrouve dans lʼhommage du Premier Ministre, Manuel Valls, cette « certaine idée de la France » des gens qui rendent hommage, mais qui voudraient ne pas le faire. Cʼest justement cette idée de la France que nous avons toujours dénoncé, nous !

Cofondateur du Service dʼaction civique, le SAC, cette milice au service de De Gaulle, Charles Pasqua vouait un culte au premier Président de la Vème. Par respect envers tous nos camarades de lʼUDB, vivants ou disparus, poursuivis par ce type de milices lorsquʼils collaient des affiches dans les années 60, impossible pour Le Peuple breton dʼavoir de lʼempathie pour cet homme autoritaire.

Sarkozy estime que « la France perd l’un de ses plus grands serviteurs », il nous semble au contraire quʼavec lui sont enterrées les affaires les plus dégueulasses, cachées sous le tapis par tous les gouvernements. Tenant un rôle opaque dans une sombre histoire de trafic dʼarmes en Angola, champion de la Françafrique, mais surtout « premier flic de France », il incarna le rôle de Ministre de lʼIntérieur comme personne. Son nom est à jamais associé à Malik Oussekine, cet étudiant frappé à mort lors dʼune manifestation contre la loi Devaquet en décembre 1986 par les « voltigeurs » mis en place par Charles Pasqua. « Combattre le terrorisme par le terrorisme » disait Charles Pasqua. Un bon moyen de ne pas régler les problèmes.

La presse passe rapidement sur la proposition de loi quʼil déposa au Sénat en 1988 pour rétablir la peine de mort. Oubliées les appels aux alliances de second tour avec le Front National lors de lʼélection présidentielle de 1988. Oublié aussi les alliances plus que douteuses du gaulliste avec les souverainistes comme De Villiers avec lequel il fonde, en 1999, le « Rassemblement pour la France ». Cette idée-là de la France, non pas « patriote » comme on a pu lʼentendre ici ou là, mais quasiment-raciste car ultra-nationaliste, quʼa-t-elle apporté de bon ?

Si la mort dʼun homme ne mérite en aucun cas dʼêtre saluée, ne comptez pas sur Le Peuple breton pour pleurer des larmes de crocodile sur ce truand épargné depuis toujours par la Justice… sans doute pour Raison dʼÉtat.

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]