La chasse aux chômeurs ou lʼattaque du droit du travail.

Pôle Emploi

En septembre dernier, François Rebsamen, Ministre du Travail, de lʼEmploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, avait choqué – à juste titre – en déclarant : « Quand on est chômeur au sens du Bureau international du travail, on recherche un emploi, et donc cʼest négatif pour ceux qui recherchent un emploi dʼêtre à coté de personnes qui ne cherchent pas dʼemploi ». M. Le Ministre (qui nʼa sans doute jamais eu à pointer dans ces agences) préfère donc « chasser le chômeur » comme dirait LʼHuma plutôt que de sʼattaquer à la financiarisation de lʼéconomie, celle qui détruit lʼemploi quʼil faut justement trouver.

Mais revenons sur la définition du mot « chômeur ». Pour lʼInsee, « un chômeur est une personne qui nʼa pas dʼemploi et qui en recherche un ». Première nouvelle ! Il nous avait semblé quʼon appelait cela un « demandeur dʼemploi » plutôt, non ? Cette confusion sémantique permet de passer sous silence le fait quʼun chômeur a cotisé lorsquʼil était en poste. À lʼinverse, une personne nʼayant jamais exercé un emploi ne peut prétendre au chômage, versé par les assedic. Le droit à chômage épuisé, les minima sociaux (type RSA) peuvent prendre le relais de l’allocation perçue et le « chômeur » reste « demandeur dʼemploi ». Mais quʼimporte les mots : un chômeur « coûte cher » à la collectivité et, après tout, en période de « crise » (sans interruption depuis 1973), tout le monde doit faire un effort !

Personne nʼest dupe de la manoeuvre qui consiste à essayer de radier des demandeurs dʼemplois pour faire baisser artificiellement le taux de chômage (de même pour les services civiques) et ainsi démontrer, par le pouvoir des statistiques, que le système économique se porte bien, mais attaquer les « chômeurs », cʼest autrement plus grave car cela remet en cause le droit du travail.

Ainsi donc, les cotisations sociales qui sont prélevées sur les salaires ne donneraient finalement pas le droit à une assurance une fois cet emploi perdu ? Plus pour longtemps à ce rythme (libéral) ! La seule assurance quʼil restera, cʼest bien de chercher un emploi. Pas le temps de faire le point, pas le temps de préparer un nouveau projet professionnel, il faut pointer et justifier lʼargent que vous recevez de Pôle Emploi pendant 18 mois. La « solidarité » devient vraiment un mot-valise, vidé de son sens.

Le processus de destruction du code du travail enclenché par la droite se poursuit donc. Cʼest aujourdʼhui que le conseil dʼadministration de Pôle emploi doit valider la généralisation des contrôles de recherche dʼemploi pour les chômeurs. 200 agents seraient affectés à cette tâche. Nous leur souhaitons bon courage par avance pour « redynamiser » les mauvais élèves tant lʼaccueil risque dʼêtre agréable. Gageons que ce seront eux qui paieront les petites phrases assassines de M. Le Ministre. Encore une injustice !

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]