Projet de loi sur le renseignement : Paul Molac vote « non »

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Cʼest aujourdʼhui quʼavait lieu le vote sur le projet de loi relatif au renseignement, un projet de loi présenté jeudi 19 mars par le Premier Ministre. D’après le site du gouvernement, ce projet « entend donner un cadre légal cohérent aux services tenant compte des évolutions technologiques, et notamment dʼInternet ». En ligne de mire, le terrorisme bien sûr, mais également à ce qui touche à « lʼindépendance nationale, lʼintégrité du territoire et la défense nationale » ou encore « la prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions et de la criminalité et de la délinquance organisées ». Rassurons-nous cependant, « il nʼy aura aucune surveillance massive », déclarait Manuel Valls le 19 mars !

« le juge n’est pas dans la boucle »

Néanmoins, pour le député UDB Paul Molac, ce texte nʼest pas abouti. Et même si, comme il lʼavouait sur France Bleu Breizh Izel ce 5 mai « il faut avouer que ce genre de pratiques [de surveillance] existent déjà » et que, par conséquent « ceux qui disent que cʼest un progrès ont raison », le député de la circonscription de Ploërmel votera « non ». Ce qui inquiète Paul Molac, cʼest « quʼon ne mette pas un juge dans la boucle » afin de déterminer « sʼil faut poursuivre les investigations, ou pas ». Au contraire, cette loi donne un pouvoir très important au Premier Ministre qui peut demander une procédure, lʼautoriser après avis et la mettre en oeuvre. Paul Molac, on le sait bien, nʼest pas un adversaire du gouvernement dont il partage une partie de lʼaction, mais il sʼinquiète de lʼutilisation qui serait faite par de futurs gouvernements qui pourraient être « moins vertueux ».

Juger illégale lʼaction politique contraire à une conception de la République ?

Sans préjuger de futurs gouvernements, reste à définir ce qui, pour celui-ci, « porte atteinte à la forme républicaine des institutions » ? Etre autonomiste, nʼest-ce pas, après tout, concevoir la République dʼune autre façon ? De là à juger illégale lʼaction politique contraire à une conception de la République, il nʼy a quʼun pas… Paul Molac, justement, avait soumis un amendement (défendu par Sergio Coronado) visant à supprimer cette mention. Lʼamendement proposait « de supprimer la finalité des atteintes à la forme républicaine des institutions ». Sergio Coronado a ainsi déclaré : « je crois qu’on peut, de manière non violente, pacifique, et ce n’est pas un hasard si M. Molac est le premier signataire de cet amendement, contester les formes républicaines de l’organisation de notre pays. Cela me paraît être le cas de certains mouvements anarchistes, de certains mouvements monarchistes d’ailleurs, qui ne le font pas en violation de la loi. Cela me paraît être le cas aussi parfois de certains mouvements régionalistes, qui contestent la forme républicaine et son aboutissement suprême qui est la République jacobine que nous connaissons. Ils ne le font pas en violation de la loi ». Évidemment, après un avis défavorable de la commission des lois et du gouvernement, lʼamendement a été rejeté.

En tout état de cause, croire que cʼest en « fliquant » que lʼon réduira le terrorisme, cʼest oublier de parler du reste, de tout le reste, des causes de ce terrorisme. Constatons, à nouveau, quʼun Etat ne peut concevoir lʼaction quʼa posteriori et que même si cette loi protège (théoriquement) mieux les journalistes, avocats ou parlementaires, même si un statut de lanceur dʼalerte voit le jour, cette loi reste un accroissement de surveillance… Et on voudrait nous faire croire quʼun surcroît de surveillance garantirait mieux nos libertés ?

> Gael Briand

Journaliste. Géographe de formation, Gael Briand en est venu au journalisme par goût de l'écriture et du débat. Il est rédacteur en chef du magazine Le Peuple breton depuis 2010. Il a également écrit « Bretagne-France, une relation coloniale » (éditions Ijin, 2015) et coordonné l'ouvrage « Réunifier la Bretagne ? Région contre métropoles » (Skol Vreizh, 2015). [Lire ses articles]